dimanche 3 novembre 2013

Gaza : à quoi joue Israël ?


Une tragédie sans fin, à laquelle chaque jour qui passe apporte son lot de malheurs. Les Palestiniens de la bande de Gaza survivent dans la haine ; tandis qu’en face, derrière le mur, les Israéliens vivent dans la peur, même si les roquettes qui leur sont régulièrement envoyées n’ont jamais causé de massacres ; comparées aux bombes au phosphore de l’opération Plomb durci, il s’agit d’une rigolade.
En 1967, après la guerre des Six Jours, le général Moshe Dayan avait conseillé au Premier ministre Golda Meir de restituer les territoires annexés aux Palestiniens, sachant qu’occupés ils deviendraient fatalement ingérables à plus ou moins long terme. Pourtant visionnaire, le grand soldat n’a pas été entendu. 
En 1993, avec les accords d’Oslo, un autre condottiere, Yitzhak Rabin, ne fut guère plus prophète en son pays et le paya même de sa vie, assassiné par un militant sioniste radical. Même Ariel Sharon, tout aussi reître, mais à l’intelligence politique moins déliée, comprit qu’il fallait abandonner le Sud-Liban et rendre à Gaza son autonomie. Et aussitôt, la droite religieuse hurla à la trahison.
Benyamin Netanyahou, leur successeur, n’est pas soldat. Né aux USA, il semble ne rien entendre à l’âme orientale, qui est néanmoins part non négligeable chez ses coreligionnaires. En effet, en 1948 et surtout avant 1918, quand la Palestine n’était que lointaine province ottomane, il y avait des Palestiniens qui vivaient là. 
Certains allaient à l’église, d’autres à la mosquée, et nombreux étaient ceux qui se rendaient à la synagogue. On n’en parlait pas, sachant que les peuples heureux – ou pas trop malheureux – n’ont pas d’histoire.
À ce titre, l’arrivée massive de juifs venus d’Europe de l’Est, ne parlant pas la même langue, ne goûtant pas les mêmes mets, n’écoutant pas la même musique et s’habillant différemment, fut une sorte de premier traumatisme. Et on notera qu’il aura fallu attendre 1999 pour qu’Ehud Barak, juif sépharade, accède enfin au poste de Premier ministre, succédant ainsi à une longue lignée d’Ashkénazes ; comme quoi on est toujours le moricaud ou le viking de quelqu’un.
Et aujourd’hui ? Grande est l’impression que si Benyamin Netanyahou voulait creuser la tombe d’Israël avec ses propres dents, il ne s’y prendrait pas autrement. Car la peur du Hamas, d’ailleurs désormais débordé par des djihadistes encore plus belliqueux, ne saurait tout justifier.
Ainsi, Gaza vit sous blocus. La bande côtière où la pêche est autorisée se réduit comme peau de chagrin. Les tunnels permettant le ravitaillement venu d’Égypte sont détruits les uns après les autres, avec la bénédiction des nouvelles autorités du Caire, alors que le président Morsi, au moins, tentait d’alléger leurs souffrances. 
Pis, Gaza, c’est la plus grande concentration d’humains au monde : 1,5 million sur un territoire plus qu’exigu. Leur dernière centrale électrique vient de cesser de fonctionner ce vendredi dernier, et les Gazaouis en sont revenus à l’âge de la bougie…
Bien sûr, 26 prisonniers palestiniens, dont certains étaient en prison depuis 1984, ont été libérés au compte-gouttes, pendant que Netanyahou ordonnait la construction de 5.000 nouveaux logements dans les territoires occupés. Soit le genre d’accord qu’on signe quand on ne veut rien conclure…
Alors, fuite en avant ? Ça y ressemble bigrement, pour l’actuel gouvernement qui, non content de s’être brouillé à mort avec Barack Obama, voit Yuli Edelstein, président de la Knesset – le Parlement local – appeler au boycott de la visite de François Hollande en Israël, prévue du 17 au 19 novembre prochain. Les Palestiniens ont peut-être la haine, mais leurs homologues israéliens paraissent, eux, éprouver comme une sorte de haine du bonheur.
Alors oui, les roquettes, les attentats-suicides, on admettra, sans grand risque de se tromper, que ce n’est pas bien, que cela ne sert à rien. Mais l’insurrection du ghetto de Varsovie, elle aussi, ne servit à rien, si ce n’est à sauver honneur et dignité. Si elles veulent préserver l’avenir, les autorités de Tel Aviv feraient bien de ne pas l’oublier…
Journaliste, écrivain.

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