vendredi 6 septembre 2013

Oradour : les « malgré-nous » condamnés à l’oubli....


Je vous écris d’une île grecque, Kefalonia, où les Allemands ont massacré il y a soixante ans, en septembre 1943, plus de 5.000 soldats italiens de la division « Acqui », lesquels, après la chute de Mussolini, voulurent rendre les armes et sympathiser avec les partisans grecs. 
Sur mon iPad défilent les images poignantes de France 2 en direct de la visite « historique » d’un président allemand et de son homologue français, au village martyr d’Oradour-sur-Glane. 
Ce village de Haute-Vienne fut brûlé avec 642 de ses habitants en juin 1944 par la division « Das Reich » qui remontait vers la Normandie… 
Alors que sur mon île seul un modeste monument témoigne de la barbarie nazie envers leurs « alliés » italiens, dans le Limousin plus nanti, un Centre de la mémoire rappelle ce que fut le plus grand massacre de civils perpétré en France durant la Seconde Guerre mondiale.
Le déplacement des deux présidents se voulait un geste symbolique fort, en cette année du cinquantenaire du traité de l’Élysée qui scellait, en 1963, la réconciliation franco-allemande. 
Il va sans dire que les discours des deux chefs d’État étaient également très attendus en Alsace-Moselle où 130.000 jeunes gens furent incorporés de force dans l’armée allemande à partir de 1942. Une dizaine d’entre eux eurent le malheur d’appartenir à la division « Das Reich » et furent jugés, sévèrement condamnés, puis amnistiés en 1953… 
Par ailleurs, 40.000 de ces « malgré-nous » sont morts ou portés disparus. Où sont-ils tombés ? Ont-ils une sépulture ? Soixante-dix ans après, en Alsace-Moselle, on est toujours sans nouvelles de plus de 10.000 d’entre eux. 
Pour beaucoup de familles, les recherches continuent, parfois en vain. François Hollande n’y a fait aucune allusion, les ignorant un peu dédaigneusement dans son discours d’Oradour, alors que son prédécesseur n’avait pas craint, en 2010 à Colmar, d’affirmer haut et fort que « les malgré-nous ne furent pas des traîtres mais, au contraire, les victimes d’un véritable crime de guerre ».
Le président allemand ne fut pas plus disert sur le sujet : estimant sans doute qu’il s’agissait avant tout d’un problème franco-français, il ne sut pas trouver les mots d’apaisement que l’on attendait en Alsace-Moselle. 
Le maire de Strasbourg, Roland Ries, l’avait pourtant admonesté solennellement avant la visite : « Il faut qu’il dise que les soi-disant incorporés de force l’étaient réellement », a-t-il déclaré, faisant allusion au procès en cours entre les incorporés de force et Robert Hébras, un des rescapés du massacre d’Oradour. 
Condamné en appel pour avoir écrit que « parmi les hommes de main, il y avait quelques Alsaciens enrôlés soi-disant de force dans les unités SS », Robert Hébras, le négationniste des « malgré-nous », était aux premières loges à Oradour lors de la visite présidentielle. 
Les deux chefs d’État lui ont même pris la main et, épaule contre épaule, les trois hommes ont posé pour la postérité… 
Me reste également en travers de la gorge la phrase de notre ami Michel Cardoze évoquant hier matin, dans son papier sur Oradour : « Le peuple alsacien dont beaucoup d’hommes avaient combattu dans l’armée nazie, certains enrôlés de force… » Ce qui revient à insinuer que la majorité d’entre eux étaient volontaires… 
Or les historiens sérieux situent le pourcentage de ces « certains » généralement aux alentours de… 95 % ! La définition du terme malgré-nous semble quelquefois incomprise et l’expression utilisée à mauvais escient. 
Répétons-le une fois pour toutes : un « malgré-nous » était un Alsacien ou Mosellan enrôlé de force dans l’armée allemande et non un volontaire ! À Oradour, décidément, les plaies franco-françaises de l’Alsace-Moselle ne se sont pas refermées… elles se sont même ravivées ! 
Et la vérité historique n’a pas gagné au change…

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