lundi 13 juin 2016

Sami Aldeeb : La signification du verset coranique « Nulle contrainte en religion » ; « aucun exégète ne laisse la liberté de choix aux polythéistes »


Dans un article mis en ligne le 17 mai 2016 sur son blog « Savoir ou se faire avoir », Sami Aldeeb, Suisse palestinien professeur des universités et auteur d’une traduction du Coran dans l’ordre chronologique,  évoque, dans le style caustique qui lui est propre, le verset coranique bien connu : « Nulle contrainte en religion (…) », revenant sur sa signification réelle, et sur l’ouvrage entier qu’il consacre à ce verset. Aldeeb rapporte dans ce contexte des articles du Code pénal arabe uniforme, puis des articles de la Déclaration des droits de l’Homme, avec lesquels le Code arabe entre en conflit. Extraits : (1)
 « Nulle contrainte dans la religion ! »
« (…) Dans chaque colloque les musulmans nous cassent les oreilles avec le verset coranique suivant : ‘Nulle contrainte dans la religion ! La bonne direction s’est distinguée du fourvoiement. Quiconque mécroit aux idoles et croit en Dieu, tient à l’attache la plus sûre et imbrisable. Dieu est écouteur, connaisseur’(2:256).
Pour comprendre le véritable sens de ce verset, j’ai examiné toutes les exégèses musulmanes du Coran, depuis le début de l’Islam jusqu’à ce jour-ci, et je les ai publiées dans un ouvrage sorti en français, en anglais et en arabe, intitulé Nulle contrainte dans la religion: interprétation du verset coranique 2:256 à travers les siècles. Ce livre, avec d’autres recueils d’exégèses de versets coraniques problématiques, est disponible sur Amazon : Nulle contrainte dans la religion: Interprétation du verset coranique 2:256 à travers les siècles, Createspace (Amazon), Charleston, 2015, 201 pages : Amazon.fr
Mahomet : “Celui qui change sa religion, tuez-le” ; la mise à mort de l’apostat confirmée par le Code pénal arabe uniforme
Les musulmans recourent au verset cité plus haut pour démontrer que l’Islam est tolérant et admet la liberté religieuse. Mais ce verset entre en conflit avec un récit de Mahomet qui dit : “Celui qui change sa religion, tuez-le”.
La mise à mort de l’apostat, celui qui quitte l’islam, est confirmée, à titre d’exemple, par le Code pénal arabe uniforme adopté à l’unanimité par le Conseil des ministres arabes de la justice en 1996 (http://carjj.org/node/237). Voici la traduction française de l’extrait pertinent :
Article 162 – L’apostat est le musulman, homme ou femme, qui abandonne la religion islamique par une parole explicite ou un fait dont le sens est indiscutable, insulte Dieu, ses apôtres ou la religion musulmane, ou falsifie sciemment le Coran.
Article 163 – L’apostat est puni de la peine de mort s’il est prouvé qu’il a apostasié volontairement et s’y maintient après avoir été invité à se repentir dans un délai de trois jours.
Article 164 – Le repentir de l’apostat se réalise par le renoncement à ce qui a constitué sa mécréance ; son repentir est inacceptable s’il apostasie plus de deux fois.
Article 165 – Tous les actes de l’apostat après son apostasie sont considérés comme nuls de nullité absolue, et tous ses biens acquis par ces actes reviennent à la caisse de l’État.
La Déclaration universelle des droits de l’homme confirme la liberté religieuse : un défi pour l’islam
La liberté religieuse a d’ailleurs posé des problèmes à toutes les religions. Ses contours sont affirmés par l’article 2 alinéa 1 et l’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme :
Article 2.1 – Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
Article 18 – Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion : ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites.
La clause de ce dernier article, qui parle de la liberté de changer de religion ou de conviction, a provoqué une réaction très vive de la part des pays musulmans. Cette question constitue probablement le plus important défi posé aux musulmans, conscients du fait que la liberté religieuse peut signifier la disparition de l’islam, comme l’affirme Al-Qaradawi : “Si l’islam ne tuait pas les apostats, il aurait disparu à la mort de Muhammad” (voir la vidéo sous-titrée: http://goo.gl/bu1PcG), dit-il en citant le verset coranique 5:33 pour justifier la mise à mort des apostats :
La rétribution de ceux qui guerroient contre Dieu et son envoyé, et qui s’empressent de corrompre sur la terre, c’est qu’ils soient tués, ou crucifiés, ou que soient coupés leurs mains et leurs pieds opposés, ou qu’ils soient bannis de la terre. Ils auront l’ignominie dans la vie ici-bas, et dans la vie dernière un très grand châtiment.
Résumé des exégèses du Coran concernant ce verset
Le sens du verset 2:256 donné par les exégèses publiées dans la présente étude peut être résumé comme suit:
1) Les polythéistes arabes, n’ayant pas de livre révélé, ne sont pas tolérés. Ils n’ont le choix qu’entre l’islam et l’épée. Souvent, les exégèses parlent d’Arabes, sans faire usage du qualificatif “polythéistes”. Les polythéistes sont souvent appelés “associateurs”, c’est-à-dire ceux qui associent d’autres divinités à Allah.
2) Les gens du livre, à savoir les juifs et les chrétiens, ont le choix entre se convertir à l’islam, conserver leur religion en payant le tribut, ou (mourir par) l’épée. Cette norme s’applique aussi aux sabéens et aux zoroastriens. On ne les contraint donc pas à changer de religion, comme les polythéistes. Mais ceux qui refusent de payer le tribut et de se convertir à l’islam doivent être tués.
3) Les polythéistes qui se convertissent au judaïsme ou au christianisme sont traités comme les polythéistes ; ils n’ont le choix qu’entre l’islam et l’épée.
4) Les captives et captifs juifs et chrétiens devenus esclaves ne sont pas contraints à devenir musulmans. Mais les captives et captifs polythéistes, sabéens et zoroastriens doivent devenir musulmans, car leur maître ne peut épouser leurs femmes ni manger de la viande d’animaux saignés par eux. Les enfants en revanche sont convertis de force, afin qu’ils n’adoptent pas une religion erronée.
« On entend par ‘contrainte’, en règle générale, la contrainte physique, ou plus concrètement la mise à mort » ; « Aucun exégète ne comprend le principe ‘Nulle contrainte en religion’ dans le sens du droit de quitter l’islam, ou du droit de ne pas pratiquer les obligations cultuelles »
5) On entend par contrainte, en règle générale, la contrainte physique, ou plus concrètement la mise à mort. Un seul exégète interprète la contrainte dans le sens de la mise à mort, de l’emprisonnement et de la privation des biens. Aucun exégète ne tient compte des restrictions imposées aux non-musulmans pour les inciter à se convertir l’islam, ni le paiement du tribut, ni les normes discriminatoires (comme l’interdiction du mariage avec une musulmane).
6) Aucun exégète ne comprend le principe “Nulle contrainte en religion” dans le sens du droit de quitter l’islam, ou du droit de ne pas pratiquer les obligations cultuelles telles que la prière ou le jeûne. Un exégète moderne dit expressément que le musulman qui refuse de prier ne peut invoquer le verset 2:256 – il doit être puni.
7) Certains exégètes, surtout modernes, rejettent l’accusation selon laquelle l’islam se serait propagé par l’épée, et estiment généralement que les guerres ont été entreprises pour se défendre ou pour pouvoir pratiquer le prosélytisme islamique. Mais aucun exégète n’envisage le droit des non-musulmans à convertir autrui.
8) Aucun exégète n’envisage le droit des enfants nés musulmans, et qui n’ont pas choisi la religion, de le faire une fois adulte. L’apostasie reste interdite. Celui qui est né musulman doit le rester.
« Aucun exégète ne laisse la liberté de choix aux polythéistes. Ceux-ci doivent être éliminés de la surface de la terre »
9) Les exégètes estiment que toute personne raisonnable devrait choisir l’islam, mais reste libre de ce choix. En même temps, ils estiment que la conversion à l’islam ne peut se faire qu’avec la volonté de Dieu. D’autre part, aucun exégète ne laisse la liberté de choix aux polythéistes. Ceux-ci doivent être éliminés de la surface de la terre, comme l’écrit un des exégètes modernes. Cela explique pourquoi les musulmans ne semblent pas émus par le massacre de plus de 80 millions d’hindouistes – ceux-ci sont considérés comme des polythéistes.
10) Les exégètes modernes estiment que l’Islam est la première et la seule religion qui admet le principe “Pas de contrainte en religion”, principe qui leurs semble correspondre à celui de la liberté religieuse des droits de l’homme. Aucun d’eux ne mentionne de contradiction entre la liberté religieuse prévue par les droits de l’homme et le principe islamique.
11) Il est souvent question d’abrogation en rapport avec le verset 2:256. Afin qu’on ne comprenne pas ce verset dans un sens général, applicable à toutes les situations, les exégètes ont estimé que le sens général en a été abrogé par les versets prescrivant le combat, et donc que le verset ne reste en vigueur que dans le sens restreint de non-imposition de la conversion aux gens du livre qui paient le tribut.
Antagonisme avec les normes constitutionnelles et internationales
Certes, le principe “Nulle contrainte en religion” peut être considéré comme une étape importante vers la reconnaissance de la liberté religieuse. Et sur ce plan, on ne peut nier que la reconnaissance de ce principe est un progrès par rapport au christianisme du VIIe siècle. Mais par rapport aux pratiques arabes rapportées par les sources musulmanes elles-mêmes, y compris dans les recueils des récits de Mahomet, la prescription coranique constitue une régression. La société arabe polythéiste reconnaît toutes les religions – sur ce plan, la morale polythéiste était supérieure aux prescriptions coraniques qui n’admettent que les gens du livre, dans certaines limites. Le fait que Mahomet ne donne aux polythéistes que le choix entre la conversion à l’islam et l’épée était en contradiction avec les normes admises par la société arabe de l’époque.
Si nous laissons de côté l’histoire arabe, le principe “Nulle contrainte en religion” ne peut en aucune manière être comparé au principe de la liberté religieuse prévue par les normes constitutionnelles modernes et les documents onusiens ou européens relatifs aux droits de l’homme.
Si nous nous limitons à la Suisse, on peut avancer que le droit musulman, basé sur le Coran et la sunnah, n’est pas compatible avec la conception de la liberté religieuse prévue par la constitution suisse. (…)
(1) Le sous-titres ont été ajoutés par MEMRI...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

La grandeur de Binyamin Netanyahou....

Binyamin Netanyahou était en visite aux Etats-Unis pour la conférence annuelle de l’AIPAC. Cette visite devait être triomphale. Elle a ...