S’il n’y avait une rupture avec le politiquement correct, on pourrait écrire que Trump, c’est la politique « à la porté des caniches ».
À observer le déferlement de commentaires fielleux des éditorialistes, intellectuels, hommes et femmes politiques au sujet de Donald Trump, on en vient, presque naturellement, à éprouver un brin de sympathie pour la mèche rebelle la plus célèbre des États-Unis.
L’impétrant à la fonction suprême dans le pays de l’Oncle Sam n’est guère homme à se laisser impressionner par le qu’en-dira-t-on. Son objectif louable de rendre à son pays sa grandeur séculaire (« Make America Great Again ») et son souci de le préserver des menaces extérieures rencontre, par bien des aspects, le combat des « mal-pensants » du Vieux Continent.
Peut-on pourtant, lorsque l’époque exige des hommes d’État capables de s’élever au-delà du menu fretin, s’enthousiasmer pour la candidature disruptive d’un homme qui multiplie les frasques, les écarts, les grossièretés et qui ne s’encombre pas d’urbanité ?
Donald Trump s’est, jusqu’à présent, davantage fait remarquer pour ses insultes à répétition à l’encontre de ses adversaires et des journalistes que pour ses fulgurances politiques ou son recours à la culture. Lors d’un meeting électoral, il accompagna ainsi d’une imitation son emportement à l’encontre d’un journaliste atteint d’arthrogrypose. Au sujet de John McCain, vétéran du Vietnam, il déclara : « J’aime les gens qui n’ont pas été capturés. »
Les femmes sont, quant à elles, qualifiées tantôt de « grosses truies », tantôt de « bonnes à rien ». La journaliste Megyn Kelly eut droit aux meilleurs égards : « On pouvait voir du sang sortir de ses yeux, du sang sortir de son… où que ce soit ». Parlant de Carly Fiorina, il lâcha :« Regardez cette tête ! Qui voterait pour ça ? » La seule trouvant grâce à ses yeux est la sienne, mannequin qu’il trimbale et exhibe comme un trophée. Dans sa dernière frasque, le candidat républicain relaya sur Twitter un montage comparant la longiligne Melania à l’épouse de son concurrent.
Que ce soit Beppe Grillo – humoriste devenu homme politique, qui utilisa à foison le terme « vaffanculo » -, Nicolas Sarkozy – qui se fit remarquer par ses insultes à l’encontre de ses adversaires (« Le bègue, je vais le crever », en parlant de François Bayrou) mais aussi des citoyens (« Casse-toi, pauv’ con ») – ou NKM – qui traita les climato-sceptiques de « connards » -, l’insulte n’est guère l’arme des esprits brillants : n’est pas Démosthène (et ses Philippiques) ni Victor Hugo (et ses diatribes envers Napoléon le Petit) qui veut.
S’il n’y avait une rupture salutaire avec le politiquement correct, on pourrait écrire que Donald Trump, c’est la politique « à la porté des caniches », l’illustration par l’absurde de la théorie sur la déviance (Becker), le saltimbanque qui observe le petit peuple depuis sa tour d’ivoire (la Trump Tower), la victoire de l’immoralisme, le nivellement par le bas du débat public et, enfin, le triomphe de la clinquante vulgarité que, par effet de mode, l’on nomme désormais « bling bling ».
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