Les capacités maximales d'accueil de la capitale bavaroise, Munich, ont été atteintes. La chancelière a décidé de fermer provisoirement ses frontières.
« Franchement, on commence vraiment à avoir du mal à faire face. La meilleure volonté du monde ne fait pas tout... » Cette volontaire ne cache pas sa déception en prononçant ces quelques mots.
Voilà plusieurs jours qu'elle ne ménage pas sa peine et son temps pour tenter d'aider les dizaines de milliers de demandeurs d'asile qui arrivent sans discontinuer à la gare de Munich.
Avant-hier, 12 000 migrants se sont encore fait enregistrer sous les tentes gonflables montées à la va-vite par les autorités après l'ouverture des frontières décidée par Berlin la semaine précédente.
Angela Merkel avait juré que son pays allait pouvoir gérer l'afflux de 800 000 à 1 million de réfugiés potentiels cette année. « Wir schaffen das » (« on va y arriver »), avait-elle promis. Mais la chancelière s'est aperçue au fil des jours que son serment relevait plus de la méthode Coué que de l'analyse approfondie des capacités d'accueil de sa nation.
Son « yes, we can » s'est ainsi transformé hier en « no, we cannot »...
Un camouflet pour Merkel
Préférant laisser à ses sbires le soin de porter la mauvaise nouvelle, elle a demandé à son ministre de l'intérieur, Thomas de Maizière, d'annoncer à la presse que l'Allemagne allait réintroduire « provisoirement » des contrôles à ses frontières avec l'Autriche. Des centaines de policiers ont été appelés en renfort de tout le pays pour se rendre en Bavière afin de surveiller les entrées de migrants en République fédérale.
Quelques heures plus tôt, la compagnie ferroviaire autrichienne ÖBB avait annoncé la suspension du trafic avec l'Allemagne à partir de dimanche 17 heures. Ces deux annonces sont un véritable camouflet pour Angela Merkel. La « Mutti » (« maman ») de la nation a menti à ses « petits ». Qu'elle l'ait fait volontairement ou non ne change pas grand-chose à l'affaire. Sa parole sera désormais mise en doute, quoi qu'elle dise ou quoi qu'elle fasse...
L'opposition n'a d'ailleurs pas été longue à accepter ce « cadeau politique » en critiquant vertement la chancelière. L'écologiste Katrin Göring-Eckardt a jugé que le gouvernement fédéral cherchait à réintroduire le contrôle aux frontières afin de détourner l'attention du peuple de ses « propres échecs ». Le chef du parti d'extrême gauche, Gregor Gysi, pense, pour sa part, que le retour des douaniers ne « résoudra pas le problème ». Les conservateurs purs et durs ont, eux, salué la fermeté de Berlin.
Le président de l'Union chrétienne sociale (CSU), Horst Seehofer, qui n'a cessé de critiquer la politique migratoire de son « alliée », s'est ainsi réjoui que la chef du gouvernement ait accepté d'émettre ce « signal important ». « C'était une initiative bavaroise », a tenu à souligner le leader à la culotte de peau. Angela Merkel a également reçu hier un soutien dont elle se serait bien passée. Viktor Orban, le Premier ministre hongrois ultranationaliste qui a ordonné l'érection à ses frontières avec la Serbie d'un grillage de plus de trois mètres de haut hérissé de barbelés pour empêcher l'arrivée de demandeurs d'asile, a exprimé son « entière solidarité » avec Berlin après le rétablissement des contrôles près de l'Autriche.
Certaines pilules sont parfois difficiles à avaler, mais la chancelière a au moins eu le courage d'écouter les cris d'alerte lancés dans tout le pays ces derniers jours.
Le maire social-démocrate de Munich, Dieter Reiter, a notamment révélé hier que les capacités d'hébergement de sa ville avaient été atteintes. Dans la nuit de samedi à dimanche, plusieurs dizaines de migrants ont été obligés de dormir à même le sol dans la gare centrale faute de place dans les centres d'accueil. Une première depuis le début de cette crise...
Hier, des dizaines d'étrangers erraient sur les quais et devant les magasins. Ce « désordre » ne fait que renforcer les inquiétudes de nombreux Bavarois qui se demandent comment leur paisible et... riche région pourra supporter ces arrivées massives de demandeurs d'asile. Pour parer au plus pressé, la compagnie ferroviaire nationale, Deutsche Bahn, a permis hier à des dizaines de migrants de monter à bord d'un de ses trains rapides pour rejoindre Berlin.
Les passagers qui avaient payé leur billet ont été priés de prendre une réservation pour un prochain ICE (train à grande vitesse). Un « malheur » n'arrivant jamais seul, la gare de Munich a dû être entièrement évacuée la nuit dernière après qu'un chien a détecté des traces de poudre près d'un point d'information. La loi des séries est parfois cruelle...
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