mardi 15 octobre 2013

Quand la France copie l'Amérique dans ce qu'elle a de pire....


La France se pique d'antiaméricanisme et ne cesse de singer les États-Unis dans ce qu'ils ont de pire. François Kersaudy en dresse l'inventaire.

Que nos actuels dirigeants restent coincés entre une social-démocratie frileuse et un marxisme résiduel, chacun peut le voir - sauf les aveugles, bien entendu. 
Mais ce qui est plus surprenant, c'est le degré d'américanisation qui prévaut dans une Francepourtant marquée par des décennies d'antiaméricanisme primaire.
 Nous ne parlons pas là de la multiplication exponentielle des Kevin, Samantha, Sue Ellen et autres J.R., des fast-foods, des gay prides, des jeans, des sitcoms, des talk-shows, du chewing-gum, des bandes ethniques, du speed-dating, du crack, du rap, des sectes prédatrices et des théories du complot, mais bien de l'influence démesurée qu'exerce sur nos politiques et nos institutions cet "impérialisme américain" tant décrié. 

Spin doctors, First Lady et primaires...

Il faut bien l'admettre : depuis quarante ans au moins, la plupart de nos innovations les plus hardies ne sont que des imitations serviles et approximatives des pratiques américaines : la méthode globale, importée en France au moment même où les Américains constataient ses effets délétères ; le politiquement correct, une lubie bêtifiante maintenant tournée en dérision aux États-Unis, mais encore prise au sérieux chez des Français réputés cartésiens ; 
la prolifération anarchique des spécialistes de la communication, calqués sur les "spin doctors" anglo-saxons qui transforment tout discours politique en jargon synthétique préformaté ; le quinquennat, un effort maladroit pour se rapprocher du mandat présidentiel américain, avec les mêmes inconvénients en termes de paralysie gouvernementale et d'électoralisme forcené ; la "première dame", une traduction un peu primitive de la "First Lady" américaine ; la discrimination positive, copie conforme d'une "affirmative action" devenue nuisible pour ceux-là mêmes qu'elle devait épauler ; 
la toute nouvelle "peine de probation", autre pâle imitation vouée à l'échec faute des moyens de la justice américaine ; les primaires, une géniale invention socialiste recopiée directement de "primaries" américaines jadis tant brocardées dans notre pays ; le "care" de Martine Aubry, sorte de maternage à visage renfrogné qu'elle n'a même pas pris le temps de traduire en français ; la théorie du genre, une foucade américaine pseudo-scientifique visant à transformer les hommes et les femmes en êtres asexués, avec tous les dégâts psychiques et sociaux qui subsisteront bien après son abandon outre-Atlantique ; 
l'absence de discipline à l'école, une plaie de l'instruction scolaire américaine d'après-guerre, calquée et caricaturée dans notre enseignement à partir des années soixante-dix - précisément au moment où les Américains commençaient à y remédier ; la judiciarisation à outrance, inventée par des avocats américains cupides, et si bien imitée en France qu'il nous faut dorénavant découvrir et poursuivre des responsables à l'occasion de tout incident fortuit, depuis le raz-de-marée jusqu'à la crise cardiaque...

"Nous nous donnons beaucoup de mal pour faire les mêmes bêtises que les Américains"

Est-ce pour cela qu'un illustre politicien français disait naguère : "Au fond, nous nous donnons beaucoup de mal pour faire les mêmes bêtises que les Américains" ? La différence est pourtant que ces derniers sont pragmatiques : 
les théories et les pratiques les plus farfelues ont beau fleurir aux États-Unis comme des pâquerettes au printemps, celles qui dysfonctionnent ou dépassent les limites du raisonnable sont recadrées ou supprimées sans états d'âme : la méthode globale a été consignée aux poubelles de l'histoire, le politiquement correct outrancier n'est plus pris au sérieux, la discrimination positive est dorénavant interdite par la Constitution de plusieurs États, et l'ardeur des chicaneurs de prétoires s'est calmée lorsque les juges ont imposé de fortes amendes pour "frivolous lawsuits" - procès sans fondement. En France, par contre, l'idéologie domine : peu importe que les lubies importées et francisées s'avèrent contre-productives, pourvu qu'elles constituent des marqueurs politiques.
 Ainsi, la méthode globale, le politiquement correct, la discrimination positive, l'antiracisme sélectif et la théorie du genre resteront sans doute des totems intangibles, quels qu'en soient par ailleurs les effets pervers...

La France croule sous le poids de ses exceptions

Les Américains pourront en outre nous faire remarquer que nous traînons bien des boulets uniques au monde, qui ne doivent absolument rien à leur exemple : les 35 heures, la dictature des syndicats politisés de la fonction publique, la détestation des patrons, l'assistanat débridé, le mille-feuille administratif, l'ISF, les RTT, le RSA, la fonctionnarisation de l'économie, le prurit de l'imposition maximale, la tendresse envers les délinquants "victimes de la société" - et même le fantôme du maréchal Pétain, promené en épouvantail pour faire accepter le laxisme récurrent en matière de sécurité et d'immigration.
Dès lors, ces mêmes Américains auront beau jeu de nous rappeler la phrase de Tocqueville : "En politique, ce qu'il y a souvent de plus difficile à comprendre, c'est ce qui se passe sous nos yeux." En réalité, nous le comprenons parfaitement, mais nous refusons simplement de l'admettre...
François Kersaudy, Professeur émérite de langue et civilisation anglo-saxonne à l'université de Paris I. Auteur de Winston Churchill (Tallandier) et De Gaulle et Roosevelt (Perrin.

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