Une autre histoire…
C’est peut-être là, où le bât blesse, encore une fois. Peut-être ? Sûrement. Parce que ça ne fait que recommencer.
En tous les cas, pour Claire Rubinstein Cohen, revenue aux sources de son enfance, à Sousse, l’ancienne Hadrumete, révolution ou pas, même si c’est dit entre les lignes, en filigrane, comme une dentelle d’Alençon, tout, ou presque est perdu, dans une histoire qui appartient désormais à la grande Histoire, comme une page, dans un livre oublié, tournée, définitivement, par une main implacable qui s’en fout des souvenirs, ne connaît pas les morsures de l’exil, pratique le déni sans vergogne, et cherche à réécrire l’Histoire à sa guise, avec son arme de prédilection : l’exclusion.
C’est à la lisière de ces frontières-là- de l’oubli, que Klara, entre doute et espoir, refait le chemin à rebours, presque en catimini, pour retrouver une douceur perdue, il y a bien longtemps de cela, très longtemps, et qui finit par se heurter à un mur de silence, comme une chape de plomb qui s’abat avec brutalité sur ces souvenirs enfouis, afin que le présent ne puisse rejoindre son passé. L’avenir en sera morcelé, et la « recherche du temps perdu » débouchera sur une impasse. Grignoté, l’espoir, comme une peau de chagrin dont la surface rétréci à mesure, jusqu’à l’évanouissement. Mais le balcon de la vieille maison, la tendresse de la grand-mère, et son étreinte si chaude, la veille du départ pour un autre pays, pour une autre vie, personne ne pourra les effacer de sa mémoire ; et le pays a aussi une mémoire, à préserver.
« Frontières » est l’une des nouvelles de ces « Ecrits de femmes » (Ed. Arabesques), qui vous interpelle le plus, et vous touche le cœur, à la lecture de ce recueil, signé également par d’autres voix de femmes, sur un autre ton et une autre musique. Nous citerons : Jihène Ameur – surprenante Anaïs ! - , et Sonia Cheniti, à la délicatesse du « Mouchoir mystérieux ». Est-ce une question de générations ? Plutôt une question de vécu, d’itinéraire personnel d’éloignement, qui fait que la distance creuse indéniablement le manque, comme un mal dont on se cache longtemps, mais qui finit par instiller sa douleur et son amertume, jusqu’au bout des souvenirs…
S.H
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