mercredi 30 mai 2018

LETTRES D’ERETZ: 7- UNE VIEILLE HISTOIRE DE ROQUETTES.....


Il est 7h du mat, c’est l’embauche. Donc j’embauche, c’est à dire que j’entre dans mon supermarché, passe mon doigt sur le lecteur biométrique qui enregistre mon empreinte digitale. « Patientez », marque le lecteur éléctro-biométrique. Puis, mon nom en hébreu s’affiche. C’est Ok. Mon entrée est enregistrée a 7h00 pile.
Mais à 7h01, c’est au tour de mon téléphone d’enregistrer tout autre chose. Les « alertes rouge ».
Les alertes rouges sont le signal de tirs de roquettes, missiles, obus, sur le territoire israélien. Une application nous tient, me tiens, au courant en temps réel et même en criant en hébreu: »tzeva adom! » = couleur rouge (alerte rouge) et ce, en égrainant les lieux où les tirs sont repérés.
Donc Il est 7 heure et une minute, et soudain, je suis dans mon rayon, prêt à afficher les nouvelles étiquettes de promotions du mois des produits concernés lorsque j’entends: « tzeva adom! tzeva adom! » en mode répétitif, comme un disque raye dont les paroles se superposent, tant les alertes « tzeva adom » se suivent.
Eh bien, nous revoilà comme il y a quelques années en arrière. Il y a 6 ans, 10 ans, 12 ans même. Je ne sais même plus quand, d’ailleurs! Il est vrai que nous sommes malheureusement habitués, ici, au scénario qui se répète à des périodes séparées de quelques années. Et il y en a tant que je m’embrouille avec les différentes dates et opérations de l’armée à Gaza.
Néanmoins Pug, c’est toujours le même état fébrile, le même frisson de crainte, la même chair de poule à chaque fois que « ça recommence ».
Alors, il est vrai que, cette fois-ci, personnellement, ma famille et moi sommes épargnes puisque nous sommes a Eilat et aucune affaire ne nous appelle au « nord » Soit, mais quoi donc avec nos amis, nos proches qui eux sont en première lignes? Emilie et ses enfants au kibbutz à cote de la Bande de Gaza, Avi à Sderot et sa famille a Ashkelon (amis très proches de ma femme et moi-même) ? Et puis Haïm, mon ami, jardinier en chef et mon professeur d’hébreu et sa famille? Vite un petit message sur WhatsApp pour s’enquérir de leur shalom.
Oui, Pug, nous avons chacun ici en Israël, un parent, un ami,une connaissance qui habite ici et là, et sinon, un ami qui connait quelqu’un qui connait quelqu’un, etc, et qui s’inquiète.
J’embauche et la journée se déroule au son des cartons que j’ouvre et des produits que je pose sur les étagères après le cliquetis de l’étiqueteuse qui fait « clac, clac, clac… » interrompu soudain par le trop connu : »tzeva adom! tzeva adom! tzeva adom! » Je pose l’étiqueteuse, tire mon smartphone de son étui et regarde où se trouve l’alarme. Des noms de kibbutz sont affichés. Puis Ashkelon. Entre deux article de beauté, des parquets, et des sols, j’essaye de rapidement notifier une page Facebook bien connue de toi et moi. Je n’arrive pas a tenir la cadence. Trop de boulot ou bien trop de roquettes. Je ne saurais dire.
Mes pensées reviennent à ces jours où, travaillant dans le jardinage, je partais chaque semaine une journée, pas loin de Tel Aviv pour une journée de formation et d’étude. Je passais prendre un collègue à Dimona et nous continuions notre route en faisant un arrêt a Beer Sheva.
A cette époque là, là aussi, il y avait « tzeva adom » dans ma radio. Je me souviens, Pug: S’arrêter à la station essence habituelle, faire le plein et boire le café, tout en regardant au dessus de nos têtes les missiles Grad interceptés par Kipat Barzel qui en était à ses débuts. On regardait, comme on regarderait un feu d’artifice! 
Un bruit strident, une explosion. Une de plus interceptée! Couleur rouge, jaune, orange, avec un sillage de fumée. Tout juste à quelques centaine de mètres de nous! Et allez hop, on repart direction Tel Aviv! Et la radio d’annoncer « tzeva adom! tzeva adom! Et nous de nous éloigner.
Supermarché Rami Levi. Je reviens au moment présent et c’est l’heure du déjeuner. Il est 12h30. « tzeva adom! » Je laisse car je mange! Mais entre deux bouchées de mon sandwich, je repart en pensée plus loin dans le temps, en 2008-2009, je ne sais plus. Nous venions ma femme et moi d’emménager dans la Arava. Donc de demissionner de nos emplois respectifs. Moi, comme élagueur et ma femme, de son travail au sein d’un institut de personnes déséquilibrées mentales.
C’est la où, justement, le Hamas nous taquine fortement en tirant jusque même Tel Aviv, en passant par Beer Sheva. Beer Sheva, dernier lieu où j’officiais comme élagueur.
On déménage et puis boum, ceux de Gaza tirent. Et mon ex-collègue et son équipe y sont, eux! « Allo Nader? Ma shlomkha? Tu bosses quand même!? » Oui! Entre les roquettes Grad du Hamas, Nader se doit de terminer le boulot coûte que coûte! Moi, je suis bien content, tout de même, d’avoir déménagé dans le grand sud d’Israël, sinon j’y serais aussi!
C’est que j’en ai soupé des missiles et roquettes… Lors de la deuxième guerre du Liban, quand j’étais alité à l’hôpital, les missiles du Hezbollah passaient par dessus nos têtes et « atterrissaient « plus loin en grand fracas!
Alors que je t’explique, Pug. Cloué sur un lit d’hôpital sans pouvoir bouger car tu as le ventre greffé, les yeux rivés à la télé afin de suivre les événements, tu as un sentiment de… (je cherche le bon qualificatif), bref, un sentiment inexplicable car tu sais qu’un missile bien placé et tu as le risque que tes agrafes au ventre risquent d’être vite faites et bien moins faites ou être dégrafées pour l’Eternité. Et tu ne peux pas bouger un doigt. Imagine!

Où bien, à la maison, en convalescence, tu en as marre de te terrer toutes les dix minutes, au plus fort de l’attaque, dans l’abri anti-bombe de la maison. Tu sors quand il y a une accalmie. Mais deux cent mètres après, une alerte devrait te plaquer au sol ou alors te précipiter à toute allure à l’abri anti-bombe du quartier. Or tu ne peux que rentrer la tête dans les épaules car ta vitesse d’opération est semblable à une tortue terrestre Toujours les fameuses greffes à mon ventre. Bruit strident, explosion! Ah, celle-là est tombée à Hadera, 8 km après ma maison. Tiens, ben, voila! Je rentre chez moi. Mieux vaut mourir dans son salon qu’en pleine rue, hein!
C’est l’heure de la débauche chez Rami Levi. Ma débauche. Lecteur d’empreinte digitale. 15h31. Shalom, shalom, travail, copains. Lior, ma femme est venue me prendre. « tzeva adom » est là lui aussi! Rien n’a changé en une dizaine d’année! Mais, put…! Quand va t-on leur rentrer dedans une bonne fois pour toute! Mais ça c’est pas de mon ressort! C’est celui de la politique!
Allez, à la maison. Demain sera un nouveau jour de travail et de roquettes. Ou pas!
Adishatz, Pug



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