mercredi 3 janvier 2018

Algérie : par crainte d’une intifada en Kabylie, Bouteflika se tourne vers les Amazighs...


En Algérie, Yennayer sera officiellement une fête nationale célébrée le 12 janvier 2018.

Le président de la République Abdelaziz Bouteflika a annoncé, le 27 décembre, la consécration de Yennayer, coïncidant avec le 1er jour du calendrier agraire des Berbères, comme fête nationale dans le pays.
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Qualifiée d’«historique», la décision prise par le chef de l’État algérien vise la consécration du Jour de l’An amazigh comme une journée chômée et payée pour la première fois dans ce pays musulman.
Yennayer est le premier jour de l’An du calendrier utilisé depuis l’Antiquité par les Berbères à travers l’Afrique du Nord. Fêtée selon les régions du 12 au 14 janvier de chaque année, cette fête de Yennayer correspond au premier jour de janvier du calendrier julien, qui aujourd’hui est décalé de 13 jours par rapport au calendrier grégorien.
Avant la colonisation arabo-islamique, les Nord-Africains avaient coutume de célébrer Yennayer tous les 12 janvier de chaque année pour le décréter comme « Nouvel An amazigh ».
Cette décision vient comme une réponse du régime pour calmer la rue car depuis quelques semaines, peu de médias rapportaient ces affrontements qui ont secoué la Kabylie sous forme d’une intifada dont la revendication principale est la promotion et la généralisation de la langue tamazight au niveau national en Algérie.
Cette décision soulève l’ire des extrémistes arabo-musulmans.

Les Amazighs ont réussi à faire plier le régime arabe algérien

Par modestie, les Berbères et Amazighs ont évité de prononcer des discours pompeux qui vantent l’exploit qu’ils ont réalisé avec l’officialisation de Yennayer comme un jour de fête, chômé et payé. Une modestie qui en dit long sur les combats qu’ils ont entamés depuis des années. Pourtant, leur triomphe est incontestable, quoi qu’en disent les médias arabophones.
En 2001, lors du « printemps noir », l’éventualité de la consécration de fête de Yennayer a été évoquée alors que le gouvernement avait refusé le dialogue avec des représentants de la Kabylie.
En décidant de consacrer Yennayer cette année, l’Algérie semble répondre à un contexte marqué par de récentes manifestations grandioses en Kabylie en faveur de la généralisation de la langue tamazight, mais aussi par l’émergence d’un mouvement séparatiste qui semble agacer de plus en plus les autorités à savoir notamment les collectifs d’étudiants et de lycéens des régions de Béjaïa, Tizi Ouzou et Bouira, qui avaient déclenché les contestations de début décembre 2017.
Ces collectifs avaient décidé de maintenir la grève et les contestations jusqu’à la satisfaction de l’ensemble de leurs revendications, dont, faut-il le rappeler, la promotion de tamazight et l’annulation des mesures «anti Berbère et anti amazighe» de la loi de finances 2018. Les slogans du mouvement estudiantin de Kabylie, largement dominé par les activistes du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK), étaient les plus mobilisateurs.
Les Amazighs peuvent se targuer d’avoir réussi à faire plier le régime algérien. C’est une victoire plus que symbolique pour les militants.
Signe encore plus fort : le chef de l’État algérien a accepté aussi la création d’une Académie algérienne de la langue amazighe et la promulgation prochaine d’une Loi organique devant régir la généralisation de l’enseignement et de l’utilisation de cette langue en Algérie.
Après ces mesures, la langue amazighe va accéder à un statut effectif de langue officielle du pays.

La lutte des Amazighs paie

L’émergence d’un fort mouvement séparatiste en Kabylie semble agacer de plus en plus les autorités en Algérie. Mais il y a aussi, dans ce contexte de crise économique favorable aux tensions sociales, la présidentielle de 2019. Le souci des autorités de s’entourer de toutes les conditions pour éviter une nouvelle intifada en Kabylie a poussé Alger de changer son attitude.
Dans son communiqué du 27 décembre, le Conseil des ministres algériens y fait allusion de manière à peine voilée en évoquant des « défis ».
« Cette mesure comme toutes celles déjà prises au profit de notre identité nationale dans sa triple composante islamique, arabe et amazighe, confortera l’unité et la stabilité nationales, alors que des défis multiples internes et régionaux nous interpellent », note le texte.
Ce n’est pas sans raison que le président algérien, comme pour faire écho aux revendications des jeunes de Kabylie récemment, a « enjoint au gouvernement de ne ménager aucun effort pour la généralisation de l’enseignement et de l’usage de tamazight, conformément à la lettre et à l’esprit de la Constitution » et « chargé le gouvernement d’accélérer la préparation du projet de Loi organique portant création d’une Académie algérienne de la langue amazighe » indique un communiqué rendu public à l’issue du Conseil des ministres.
  • Cette victoire berbère et amazighe est d’autant plus louable qu’elle incarne l’intelligence, la force et la persévérance de ceux qui l’ont rendue possible durant ces dernières années.
  • Cette victoire est celle de la population berbère endurante et fière et qui a résisté contre la violence et le refus des Arabes.
  • Cette victoire est aussi celle de la stratégie de résistance pacifiste des organisations combattantes face à l’occupation arabe et contre toutes les formes de capitulation promues par le pouvoir algérien entièrement dévoué à la cause de leurs maîtres palestiniens au Proche-Orient. Les Amazighs ont affirmé sans complexe leur identité berbère assumant ainsi leur appartenance à l’Afrique du Nord.
Expression d’une volonté d’émancipation de la part de populations berbères pleinement conscientes des liens qui les unissent à leur terre, cette victoire va effrayer les milieux arabes algériens. Les Amazighs ont bravé les interdictions et n’ont pas renoncé à affirmer leur propre résistance à un ordre colonial arabe qui veut les maintenir sous son joug.
Et la victoire des Amazighs est aussi celle des juifs d’Algérie : les deux peuples sont unis par un destin et des liens culturels et spirituels forts, mais aussi par une même oppression coloniale arabo-islamique. Pour les Amazighs comme pour les juifs, la lutte continue. Il s’agit d’une nécessité existentielle.
Face à la poursuite de la colonisation arabe, les Amazighs en Algérie vont poursuivre un mouvement qui œuvrera pour une émancipation et une autonomie réelles de leur communauté. Cette victoire n’est que le prélude…
Le mouvement indépendantiste s’appuie déjà cette année sur le Jour de l’An amazigh pour rallier la population et communiquer sur le Mémorandum pour son droit à l’autodétermination, déposé à l’ONU le 28 septembre 2017 par son président M.Ferhat Mehenni.
Pour rappel, en Israël, à la demande des citoyens amazighs de ce pays, d’origines marocaines et algériennes, des élus locaux ont décidé de baptiser des rues en Israël avec des noms amazighs.
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