On ne peut se fonder que sur des conjectures pour comprendre la réaction modérée et discrète de l’Iran à la suite du bombardement, le 2 décembre, de sa base située dans la zone du village d'Al-Kiswah au sud de Damas. L’Iran s’était abstenu de manifester sa désaprobation pour ne pas éveiller l'attention sur les préparatifs de son installation durable en Syrie. Il avait volontairement adopté un profil bas car le courant ne passe plus avec la Russie. D’ailleurs le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a annoncé qu’il ne se sentait pas engagé par l’accord de désescalade concernant le sud de la Syrie, conclu entre les Etats-Unis et la Russie.
Zarif en Italie |
Lors d'une visite en Italie, le ministre iranien avait soutenu que les Etats-Unis et la Russie ne pouvaient pas décider pour l'Iran, dont la présence en Syrie était basée sur une demande du gouvernement syrien, et qu’en tout cas, la Russie n'avait fait aucune demande à l'Iran. Il avait ajouté que l'objectif des États-Unis était de faire partir l'Iran de Syrie, alors que selon lui, seuls doivent en sortir ceux qui y sont entrés sans être invités.
Les services de renseignements israéliens ont apporté un autre éclairage sur l’attitude de l’Iran. Ils ont révélé que la visite en Syrie, en octobre 2017, du chef d'État-major des forces armées iraniennes, Mohammad Hossein Bagheri, avait échoué alors qu'il espérait des résultats concrets. Ces précisions inhabituelles, d’un service généralement discret, tendent à dédramatiser la présence iranienne en Syrie.
Rien ne va plus puisque la Syrie a rejeté les revendications iraniennes comprenant la location d'une base navale pendant 50 ans, l'établissement de bases aériennes et l'octroi de concessions pour l'extraction de phosphate. Par ailleurs, la Syrie a bloqué l'importation de marchandises iraniennes pour les remplacer par des produits turcs selon le vice-président de la Chambre de commerce iranienne, Hossein Selahvarzi. Ce dernier a rapporté que, malgré les accords conclus entre les deux pays et les milliards de dollars de crédit accordés par l'Iran au régime syrien, Damas limite l'importation de marchandises iraniennes.
Délégation iranienne en Syrie |
Rien ne va plus puisque la Syrie a rejeté les revendications iraniennes comprenant la location d'une base navale pendant 50 ans, l'établissement de bases aériennes et l'octroi de concessions pour l'extraction de phosphate. Par ailleurs, la Syrie a bloqué l'importation de marchandises iraniennes pour les remplacer par des produits turcs selon le vice-président de la Chambre de commerce iranienne, Hossein Selahvarzi. Ce dernier a rapporté que, malgré les accords conclus entre les deux pays et les milliards de dollars de crédit accordés par l'Iran au régime syrien, Damas limite l'importation de marchandises iraniennes.
En fait, des fissures dans l'axe irano-syrien-russe sont apparues. La Syrie n'a pas carrément rejeté les demandes iraniennes, par opportunisme, mais le président Assad a pris soin de ne pas céder à toutes les exigences iraniennes, par crainte d’envenimer les relations avec Israël et de conduire à une escalade militaire. Les media iraniens commentent l’existence d’une discorde entre l'Iran et la Russie à propos de la Syrie et confirment le doute iranien sur les réelles intentions de la Russie au sujet du processus de négociations. Pour contrecarrer un éventuel «lâchage» russe et pour compenser les déconvenues syriennes, l’Iran veut donc bétonner sa présence en Irak après l’effondrement de Daesh. Le secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale iranien, Ali Shamkhani, a rencontré le chef du Conseil suprême islamique d'Irak pour lui conseiller d’empêcher la dissolution des milices chiites en Irak, en lui expliquant que ces milices indépendantes assuraient l’influence permanente de l’Iran en Irak.
Dans une allocution à Téhéran devant un vaste rassemblement des forces du Basij, le Commandant en chef du Corps des Gardiens de la Révolution islamique, le général Mohammad-Ali Jafari, a confirmé que des cellules de résistance armées sont établies à travers le Moyen-Orient. Il a ajouté qu’il voulait s’inspirer des unités libanaises de Hezbollah pour développer des forces populaires au Yémen et dans d’autres Etats régionaux afin d’imposer l’influence iranienne. Le général Jafari a déclaré : «Notre guerre ne connaît pas de frontière et comme vous l'avez vu en Syrie, les musulmans de tous les pays se sont précipités volontairement sur le champ de bataille contre l'ennemi». Il a salué l'activité d'environ 100.000 combattants dans les milices populaires, établies ces dernières années en Syrie et en Irak, conformément au modèle Basij, la force paramilitaire iranienne fondée par l'ayatollah Khomeini en novembre 1979 afin de fournir des jeunes volontaires populaires aux troupes d'élite. Il a précisé qu’il fallait résister à «l’arrogance de l’Occident car la guerre idéologique ne connaît pas de frontières».
général Mohammad-Ali Jafari |
L’implication iranienne continue pourtant à se développer en Syrie. Le 10 novembre, la BBC a rapporté que, aux dires d’un service de renseignements occidental et sur la base d’images satellite, les travaux de construction d’une base militaire syrienne permanente ont débuté en 2017. Le site «Iranian Diplomacy» a fait valoir qu’un accord tacite entre la Russie et les Etats-Unis a créé un équilibre entre les puissances régionales. Aucune puissance mondiale ne permettra à une seule puissance régionale de contrôler le Moyen-Orient, a fortiori pas l’Iran. C’est pourquoi, malgré les désaccords visibles entre Washington et Moscou, ils sont convaincus que rien ne doit perturber l'équilibre stratégique au Moyen-Orient. En vendant ses armes à l’Iran, à la Turquie et à l’Arabie saoudite, la Russie a imposé son retour au Moyen-Orient dans le cadre de ses propres objectifs et intérêts et pas dans l’intérêt d’un pays tiers, l’Iran, qui n’est pas invité à s’interposer dans ses plans.
Base iranienne en Syrie |
Les Israéliens qualifient la Russie de «plus redoutable adversaire de l’Iran dans la nouvelle Syrie». Il convient de mentionner que le 21 novembre, Ali Shamkhani, secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale iranien, a tenu pour sa défense à souligner que l'implication de la Russie en Syrie n'a commencé qu'en 2015, alors que l'Iran et l'Axe de Résistance sont actifs en Syrie depuis le début de la crise en janvier 2011. En fait les désaccords entre l'Iran et la Russie, malgré le maintien d’une coopération stratégique entre les deux nations, sont le résultat du désir de Moscou et de Téhéran d'accroître chacun leur influence et même de gagner l'hégémonie en Syrie.
L’implication iranienne en Irak est forte. Le secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale iranien, Ali Shamkhani, a mis en garde contre la dissolution des milices chiites en Irak et qualifié la demande d’Emmanuel Macron de dissoudre les milices, de «conspiration conjointe des pays occidentaux et d'Israël visant à ramener l'instabilité et le terrorisme dans la région». Pour l'instant rien n'est fait pour empêcher que le torchon ne brûle entre l'Iran et la Russie.
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