Israël a décidé d’annuler la libération du dernier groupe de prisonniers palestiniens prévue dans le cadre des pourparlers de paix, a déclaré, jeudi 3 avril, un responsable israélien. Les négociateurs israéliens ont informé leurs homologues palestiniens du refus d’Israël d’honorer la promesse de relâcher vingt-six détenus au cours d’une réunion dans la nuit de mercredi destinée à éviter un échec des pourparlers, a ajouté ce responsable, qui a requis l’anonymat.
Israël réagissait ainsi à la décision de l’Autorité palestinienne de demander son adhésion à quinze accords et traités internationaux, a expliqué une source proche des négociations. Tel-Aviv réclame désormais un bilan de ces pourparlers directs, qui se déroulent sous l’égide des Etats-Unis. Le secrétaire d’Etat états-unien, John Kerry, avait appelé mardi « les deux parties à faire preuve de retenue ».
Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne, avait annoncé mardi ces demandes d’adhésion, peu après l’annonce d’un nouvel appel d’offres par le gouvernement israélien pour la construction de sept cent huit logements dans le quartier de colonisation de Gilo, à Jérusalem-Est occupée et annexée.
Les Palestiniens ont rétorqué que le refus d’Israël de relâcher ce dernier groupe de prisonniers les libérait de leur promesse de ne pas chercher la confrontation avec Israël aux Nations unies ou au sein d’autres instances internationales.
Parmi les textes signés mardi par Mahmoud Abbas figurent les conventions de Genève, les traités internationaux fixant les règles de protection des personnes en cas de conflit armé et d’occupation. Les Palestiniens espèrent que leur adhésion à ces traités leur permettra de saisir plus facilement la Cour pénale internationale (CPI), notamment au sujet de la poursuite de l’occupation des terres palestiniennes saisies par Israël pendant la guerre de 1967.
Américains et Israéliens ont toujours dit que la stratégie de M. Abbas visant à obtenir la reconnaissance de l’Etat de Palestine par le biais d’une adhésion aux agences des Nations unies entraînerait de leur part des représailles. C’est ce qui s’est passé lorsque la Palestine est devenue membre à part entière de l’Unesco (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture), en octobre 2011, puis Etat observateur non-membre de l’Organisation des Nations unies, en novembre 2012.
Ainsi, parallèlement à cette escalade diplomatique, les Palestiniens multipliaient-ils les déclarations conciliantes. « Nous tourner vers certaines agences de l’ONU ne signifie pas que nous interrompons totalement le processus de paix », avait dit le négociateur palestinien Mohamed Chtayyeh.
La tactique onusienne des Palestiniens met en péril les négociations
Mahmoud Abbas, le 1er avril à Ramallah, lors de la signature d’un document de candidature pour l’adhésion à des agences onusiennes. | AP/Majdi Mohammed
Les négociations israélo-palestiniennes ont toujours comporté une part de psychodrame. En dépit d’une brusque détérioration des relations entre les deux parties, la décision de Mahmoud Abbas, président de l’Autorité palestinienne, d’adhérer à quinze conventions et traités internationaux pourrait relever, selon certains observateurs, d’un tel registre :
« Les Palestiniens, explique un diplomate européen, ne pouvaient que réagir à la décision d’Israël de ne pas relâcher, comme il s’y était engagé, le dernier groupe de 26 prisonniers palestiniens. Ils ont choisi de le faire en commençant à mettre à exécution la menace qu’ils laissent planer depuis longtemps d’obtenir une reconnaissance des Nations unies. »
« Il est cependant probable que les Israéliens vont finir par relâcher ces prisonniers, et les Palestiniens, qui ont voulu, au travers de cet épisode, rétablir la crédibilité de leur menace, n’auront plus qu’à suspendre la démarche qu’ils viennent d’entreprendre », poursuit cet expert du dossier. Ainsi s’exprime la thèse optimiste. L’autre lecture des événements qui se sont succédé depuis quarante-huit heures incite à penser que l’atmosphère de crise n’est pas feinte, et que le processus de paix, relancé en juillet 2013 après trois ans de coma, est sur le point de s’effondrer.
La Palestine "va payer cher" son pas vers l’ONU
Les Palestiniens vont "payer cher" leur décision de relancer leurs démarches d’adhésion aux agences de l’ONU et traités internationaux, a averti mercredi un ministre israélien, les menaçant de sanctions économiques, voire d’annexion de territoires de Cisjordanie.
"S’ils menacent maintenant (de se tourner vers les institutions de l’ONU), ils doivent savoir une chose : ils le paieront cher", a déclaré à la radio publique le ministre du Tourisme Uzi Landau.
Annexion
Ce dernier n’a pas exclu la possibilité pour Israël d’annexer des portions de territoire palestinien occupé.
"L’une des mesures possibles serait pour Israël d’appliquer sa souveraineté sur des secteurs qui feront clairement partie de l’Etat d’Israël dans le cadre de toute solution future", a menacé M. Landau.
Le ministre faisait référence aux secteurs de la Cisjordanie occupée où sont implantés des colons juifs, Israël espérant conserver ces zones après un futur accord de paix. Israël pourrait aussi prendre des mesures de rétorsion économique en intervenant "pour bloquer leurs aides financières".
Le président palestinien Mahmoud Abbas a annoncé mardi que la direction palestinienne avait décidé de demander l’adhésion à 15 agences et traités internationaux.
Cette décision intervient peu après l’annonce d’un nouvel appel d’offres par le gouvernement israélien pour 708 logements dans le quartier de colonisation de Gilo, à Jérusalem-Est occupée et annexée.
Un accord conclu sous l’égide du chef de la diplomatie américaine John Kerry a permis la reprise en juillet pour neuf mois des négociations de paix, un délai arrivant à échéance le 29 avril.
En vertu de cet accord, la direction palestinienne avait suspendu jusqu’à la fin des pourparlers toute démarche d’adhésion aux organisations et conventions internationales auxquelles le statut d’Etat observateur obtenu en novembre 2012 à l’ONU lui donne accès.
En contrepartie, Israël s’engageait à libérer en quatre phases 104 prisonniers incarcérés avant les accords d’Oslo de 1993, dont les trois premiers groupes ont été relâchés. Mais le dernier contingent n’a pas été libéré comme prévu samedi dernier.
A la suite de l’annonce palestinienne mardi soir, M. Kerry a annulé une visite prévue mercredi à Ramallah pour rencontrer M. Abbas.
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