Prochaine étape : interdiction du signe + dans les mathématiques ?
Un mouvement autoproclamé "partisans d'al-Qaida et du djihad" a donné aux pharmaciens marocains un mois pour retirer les symboles de la croix de la devanture de leurs magasins, sous peine de décapitation.
"En 2009, la France croisée a fait miroiter aux pharmaciens des profits financiers et des remises sur les médicaments en échange de l'affichage de la croix verte à côté du croissant vert", affirme une lettre publiée en juillet dernier sur plusieurs forums en ligne. "Nous exigeons que vous retiriez ces croix des façades de vos pharmaciens pour respecter notre religion", poursuit cette menace en ligne. "Être prévenu, c'est être prémuni", poursuit l'auteur anonyme. "Nous vous donnons, à vous et à ceux qui travaillent avec vous, un délai d'un mois pour revenir à votre véritable nature et nation." Cet ultimatum expire le 28 août.
Le Maroc n'a publié aucune réponse officielle à cet ultimatum en ligne. Le ministre de la Communication Khalid Naciri a déclaré le 17 août à Magharebia que "le gouvernement ne peut réagir à chacune des menaces publiées sur lnternet".
Pour sa part, Laghdaf El Ghaouti, le président de l'Union générale des pharmaciens et des professionnels de la santé, a déclaré que cette menace Internet est fausse à plusieurs égards. D'une part, le symbole de la croix a été utilisée au Maroc depuis plus longtemps qu'un an, comme l'affirme l'auteur de cette menace."Ce signe est le symbole de la pharmacie dans le monde entier et n'a absolument rien à voir avec la croix chrétienne", souligne-t-il.
"Il n'existe aucune relation entre les agissements des pharmaciens et des sociétés pharmaceutiques et de quelconques activités de croisades", a-t-il expliqué. "La logique du commerce est la seule chose qui régit ces affaires."
Ahmed Quechtar, membre de l'Association marocaine des pharmaciens, partage l'avis d'El Ghaouti, ajoutant que "l'apposition de la croix sur les façades des pharmacies n'est pas un acte délibéré, et ne relève certainement pas d'un quelconque contexte". "Les pharmaciens diplômés des facultés marocaines comprennent la différence entre le croissant et la croix", ajoute Quechtar.
Un autre pharmacien de la ville de Salé a expliqué à Magharebia que les allégations faites par l'auteur de ce message sont totalement fausses : "La France n'intervient en rien dans le travail des pharmaciens marocains, qui sont indépendants et appartiennent à des organismes professionnels indépendants."
"L'apposition de la croix est une tradition que nous avons héritée de la France", explique-t-il. "Dire que la France accorde des remises aux pharmaciens du Maroc est une affirmation fausse, car ces pharmaciens traitent de manière directe avec les sociétés pharmaceutiques marocaines. Le Maroc produit environ 85 pour cent de ses besoins en médicaments. De plus, le Maroc est considéré comme un pays pionnier dans le domaine des produits pharmaceutiques et de la réglementation de la profession de pharmacien."
Maraouan, un jeune homme, a fait part de son scepticisme à propos de cette menace sur lnternet. "Chacun veut devenir un réformateur social. Si ces gens étaient si attachés que cela à la vraie religion, ils ne se contenteraient pas de dénoncer le symbole. Par exemple, pourquoi ne parlent-ils pas des pubs et des discothèques dont le nombre dépasse celui des pharmacies dans ce pays musulman ?"
Pour sa part, son ami explique que cette "controverse sans objet" pourrait être évitée en retirant à la fois la croix et le croissant des façades des pharmacies. "Elles se reconnaissent très bien sans ces symboles", explique-t-il.
Source : Les pharmacies marocaines menacées pour la croix, Magharebia, 23 août 2010
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