lundi 1 août 2016

NKM ( Nathalie Kosciusko-Morizet )réclame "une base légale" pour lutter contre la radicalisation....


Le Point.fr : Vous avez proposé de déclarer le salafisme hors-la-loi. Comment avez-vous construit, nourri votre réflexion sur ce sujet ?
Nathalie Kosciusko-Morizet : J'ai été confrontée au salafisme à plusieurs reprises lorsque j'étais maire de Longjumeau. Il y avait dans ma ville une salle de prière salafiste, déclarée comme telle. Je n'avais aucun outil pour la fermer. En ce moment, on peut fermer une mosquée salafiste du fait de l'état d'urgence. Mais hors état d'urgence, il faut des preuves très lourdes à réunir. On doit se réfugier derrière un problème d'insalubrité, une porte de secours manquante, etc. On a un problème, mais pas les moyens de le régler !
Rendre le salafisme hors-la-loi permettrait d'avoir une base légale pour mener la lutte. Cela doit s'accompagner du développement d'un islam de France, un islam qui soit une vraie alternative pour les croyants qui veulent pratiquer paisiblement.
Dans ma liste pour les municipales de 2008, j'avais un certain nombre d'élus de religion musulmane. Je me suis rendu compte qu'ils fréquentaient la salle de prière salafiste par défaut, car c'était la seule salle de prière de la ville. J'aurais pu libérer un terrain pour y construire une mosquée, mais si je l'avais fait, elle aurait été prise en mains par les salafistes.
C'est bien la preuve qu'il faut deux types d'outils : un pour pouvoir fermer les mosquées qui posent problème et éloigner les prédicateurs, et un pour proposer aux musulmans une alternative. C'est le sens de la proposition de loi que je fais pour déclarer le salafisme illégal, et des idées que je porte pour développer un islam de France.
Dans Le MondeManuel Valls se dit favorable à une interdiction temporaire des financements étrangers pour la construction des mosquées, est-ce une bonne initiative ?
C'est très insuffisant ! Pourquoi temporairement ? Il faut se donner les moyens de les couper tout le temps ! Pour cela, il faut trouver des financements alternatifs, nationaux. Il y a deux façons d'y parvenir. J'ai proposé que soit instaurée une taxe sur le halal. C'est possible sans modifier la législation, d'ailleurs cela existe sur la nourriture casher, prélevée par les autorités religieuses juives. Cela permettrait de réunir les fonds nécessaires pour développer un islam de France. Le député Gérald Darmanin propose de son côté de revenir sur la loi de 1905 en permettant un financement public. C'est également une alternative intéressante, mais la première solution me semble préférable, car la loi de 1905 est compliquée à toucher, elle a un côté symbolique.
Un meilleur encadrement des mosquées résoudrait-il tout ? Beaucoup de djihadistes semblent se radicaliser par le biais d'Internet aujourd'hui…
À Longjumeau, un jour, une femme débarque dans mon bureau en larmes. Elle avait été mariée durant des années à un homme d'origine algérienne avec lequel elle avait eu quatre garçons. « Mes deux aînés sont en train de dériver, me dit-elle, leur père est complètement extrême, avec moi ils sont très respectueux parce que je suis leur mère, mais je ne sais pas ce qu'ils font en dehors de la maison. » Elle était très inquiète. Son petit dernier passait également ses soirées à regarder en boucle des vidéos de décapitation.
C'est après avoir discuté avec elle que j'ai décidé de déposer un amendement pour sanctionner la consultation régulière de sites faisant l'apologie du djihadisme. Afin d'avoir une base légale pour empêcher ces jeunes de regarder des vidéos sur Internet. Cela a mis quatre ans à aboutir. À l'époque, il y avait eu un débat entre ceux qui voulaient sanctionner et ceux qui assuraient que laisser libre l'accès permettait aussi de surveiller. On a fini par voter une loi prévoyant la pénalisation de la consultation de sites faisant l'apologie d'actes terroristes, elle a été promulguée le 3 juin dernier.
Cette loi est-elle suffisante à vos yeux ?
Elle est un peu restrictive car, quand vous la lisez de près, vous vous apercevez que c'est très ciblé sur les images plus que sur l'endoctrinement. Regarder des mises en scène d'exécution est sanctionné mais consulter des sites mettant la loi religieuse devant la loi de la République reste autorisé. Je le répète, pour pouvoir lutter efficacement, il faut pouvoir qualifier juridiquement l'endoctrinement au salafisme. Je sais que rendre illégal le salafisme ne va pas empêcher ceux qui le souhaitent d'être salafistes. Mais ça va permettre d'actionner un certain nombre de dispositifs, notamment dans la cyberlutte contre le terrorisme.
Pour le grand public, il est parfois difficile de comprendre qu'on ne ferme pas purement et simplement les sites qui posent problème… Les géants du Web sont considérés comme des hébergeurs. À ce titre, ils ne sont pas responsables des contenus. De toute façon, on peut difficilement leur demander une surveillance active puisqu'il n'existe pas d'algorithme permettant de vérifier automatiquement queFacebook, par exemple, n'héberge pas de contenu problématique. En revanche, depuis 2004, ils ont une obligation de retrait en cas de signalement. Cela a été un progrès, mais c'est encore insuffisant. Quand un particulier souhaite signaler un contenu manifestement illicite, les hébergeurs américains mettent souvent en avant la liberté d'expression pour éviter de retirer le contenu.
Que peut-on faire pour améliorer cela ?
Des choses très simples pour commencer. Le bouton pour le signalement sur Facebook n'est pas si simple à trouver. Idem sur Twitter. En fait, pour signaler un contenu, il faut quand même connaître la procédure et être déterminé. Autre souci, contrairement à leurs engagements, ils ne retirent pas toujours les contenus signalés. Récemment, l'UEJF et SOS Racisme ont même ouvert un contentieux sur ce motif. C'est l'autre intérêt de ma proposition de loi pour rendre illégal le salafisme : on précise certains contenus illicites.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
Je prends pour base le Code pénal. Je veux que l'on crée une nouvelle infraction dans le livre 4 du Code pénal, « Des crimes et délits contre la nation, l'État et la paix publique ». Je la définirais ainsi : « La prédication subversive qu'on définit comme le prêche est l'enseignement d'une religion radicale qui tend à faire prévaloir la loi religieuse sur les lois de la République. » Pour cela, on prévoit une peine de 10 ans d'emprisonnement et une amende de 150 000 euros. On prévoit également le signalement des sites sur lesquels il y a une prédication subversive, en vue de leur fermeture.
Depuis que la police soupçonne le tueur de Munich d'avoir acheté son arme en bitcoins sur le darknet, on reparle beaucoup de cet Internet caché. Certains politiques réclament son « interdiction ». Cela vous semble possible ?
Le darknet, c'est le Web non référencé par les moteurs de recherche. Par définition, comme ce n'est pas référencé, vous ne savez pas exactement tout ce qu'il y a dedans. On tend à considérer qu'il y en a dix fois plus dans le darknet que sur le Net émergé. Le darknet pose plus de problèmes par rapport au terrorisme que par rapport à la radicalisation. En effet, il n'est pas intéressant pour un prédicateur salafiste qui cherche à embrigader. Ceux-là s'appuient sur les algorithmes du Web visible, sur les associations de mots, par exemple, qui font que lorsque vous faites des recherches sur le mot « djihad », on vous propose de plus en plus de contenus liés au djihad. Pour trouver un site internet sur le darknet, il faut avoir une adresse précise et souvent absconse. Ce n'est pas là qu'on peut recruter. En revanche, le darknet permet deux choses : des communications discrètes entre de potentiels terroristes, et l'achat de tout ce qui est illégal, y compris des armes.
Mais attention, le darknet s'est développé à l'origine du fait des dissidents chinois. Sur le darknet, il n'y a pas que du grand banditisme, vous avez tous les dissidents politiques qui veulent échapper à des régimes autoritaires. Et puis vous avez la police, le renseignement, qui cherchent à voir ce qui s'y passe. Pour pouvoir le faire bien, nos services ont besoin de plus de moyens. En dépit des efforts, nous sommes loin du compte. Nous avons besoin d'une sévère montée en gamme de tous nos moyens sur le régalien, et notamment sur le renseignement. L'agrégat police-justice-renseignements représentait en 1990 4,5 % du PIB. Aujourd'hui, c'est moitié moins. Il faut renverser la vapeur. Il nous manque 30 milliards par an par rapport à 1990. Je crois qu'il y a un pacte national à trouver sur la baisse d'autres dépenses pour pouvoir remonter en gamme sur l'armée, sur la justice, sur la police, et sur les renseignements.
Je propose également la création d'une agence de type NSA. Les enquêteurs ont découvert qu'Adel Kermiche, le terroriste de Saint-Étienne-du-Rouvray, avait annoncé son passage à l'acte à des centaines de personnes sur l'application cryptée Telegram. Nous sommes trop faibles sur la dimension technologique. Le renseignement français tout compris, c'est 2 milliards d'euros et 13 000 personnes. Le gouvernement a décidé d'augmenter les effectifs d'ici à 2017, mais cela reste modeste. La NSA, c'est 10 milliards, 35 500 personnes, 21 500 en propre et 14 000 dans la crypto des armées.
Pourquoi ces messageries échappent-elles à toute surveillance ?
Là-dessus, il y a un débat aux États-Unis comme en France. Aujourd'hui, ces messageries sont cryptées et non accessibles. La question récurrente est de savoir si on met un backdoor, c'est-à-dire la possibilité pour les services de renseignements de pénétrer ces messageries. Il y a eu un conflit récemment aux États-Unis. La partie numérique a résisté contre la CIA.
J'ai posé la même question en France, lors du débat sur la loi numérique. Sans succès. Je comprends les résistances. Si vous créez un backdoor, vous fragilisez le système. Des gens malveillants pourront entrer dans votre téléphone, pas seulement les services. Et par ailleurs, vous ne trouverez pas forcément la martingale pour traquer les terroristes parce qu'ils utilisent aussi d'autres moyens de communication (téléphones jetables, brouillons de leurs boîtes mails, etc.). Mais enfin, c'est un nouvel outil pour nos services, qui le réclament. La question mérite au moins d'être posée.


1 commentaire:

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