mardi 14 février 2012

Connaissez-vous l’histoire de la Hara (Tunisie)? Par EmileTubiana....




 Sidi Mahrez était un homme pieux et religieux. Il était aussi le conseiller du bey. Il entrait et sortait dans le palais à sa guise. Il avait une grande influence sur le bey. Tous les jours il faisait croire au bey qu’il priait à la Mecque. Le bey n’avait jamais douté de sa bonne foi. Du temps de Sidi Mahrez, il n’était pas permis aux Juifs de passer la nuit dans la capitale Tunis. Celle-ci était entourée de murailles et avait des grandes portes comme Bab Esuiqa, Bab Saadoun, Bab El Khadra et autres que l’on fermait tous les soirs. Les Juifs faisaient du commerce dans la ville durant le jour et le soir ils devaient sortir de la ville. En ce temps-là les juifs habitaient dans les environs de Tunis et dans les villes du pays. La nuit, à l’extérieur de la ville, il y avait des bandits qui rodaient partout et s’attaquaient aux Juifs comme aux Musulmans qui étaient plus aisés.

Cette situation devenait de jour en jour plus dangereuse et insupportable. Les Juifs voulaient à tout prix trouver un moyen de vivre dans l’enceinte de la ville et jouir de la protection des murailles et de la garde du bey. Les leaders juifs qui faisaient de tout pour obtenir la permission d’habiter dans l’enceinte de Tunis, se conseillèrent entre eux et trouvèrent une solution astucieuse. Ils trouvèrent les meilleurs bijoutiers juifs et leur demandèrent de créer secrètement deux bracelets de femme sans pareil. Quand ces bracelets étaient prêts, ils allèrent voir le bey pour lui remettre un seul bracelet comme cadeau pour sa femme. Ils gardèrent le deuxième bracelet chez eux. Quand ils remirent ce merveilleux cadeau, le bey était très content et remercia le groupe, ensuite il alla de suite l’offrir à sa femme. Celle-ci admira ce bracelet qui était un chef d’œuvre, tellement il était beau. Le soir quand le bey la rejoignit, elle sourit tout en montrant son nouveau bracelet, puis elle fit un gémissement qui ne manqua pas d’attirer l’attention du bey. Celui-ci, qui était étonné de voir sa femme gémir si profondément, lui dit:

    « Ma chère pourquoi gémis-tu? » puis avec un sourire elle fit:
    « Ya Khsara » (Quel dommage!) Le bey étonné de la réaction de son épouse lui demanda:
    « Mais ma chère! Pourquoi ce mot, dommage? » La reine lui répondit:
    « Mon bey, quel beau bracelet, c’est dommage que je n’ai pas sa paire. » Le bey, pour la rassurer, et d’une voix toute généreuse lui dit:

    « Ya lella, mais je vais de suite commander le deuxième bracelet. » La reine l’embrassa, tellement elle était contente.
Le lendemain le bey fit convoquer les Juifs qui lui avaient remis ce cadeau. Ceux-ci comprirent que leur tactique adoptée avait bien mordu, ils se pointèrent immédiatement chez le bey à l’heure convenue et firent:
    « Ya sidna, que pourrons-nous faire pour vous? » Le bey remercia les Juifs pour ce merveilleux cadeau et leur demanda s’ils pouvaient en commander un deuxième bracelet mais cette foi-ci à son compte. Puis il ajouta qu’il était prêt à payer le prix qu’il fallait. Les Juifs tout heureux firent:

    « Votre Majesté, votre demande est très simple, ce bracelet était fabriqué par un bijoutier dont l’atelier se trouve à la Mecque et ce bijoutier est connu par tous les habitants de cette région. Du reste Sidi Mahrez qui va prier tous les jours à la Mecque, comme il le dit, est bien placé pour vous l’apporter demain après sa prière. Vous pouvez lui dire que s’il avait des problèmes, qu’il vienne nous voir et nous lui remettrons le nom et même l’adresse de ce bijoutier avec nos bonnes recommandations. Le bey était tout content de pouvoir satisfaire la reine le lendemain. Ne pouvant pas avoir un homme plus fidèle et plus rapide que Sidi Mahrez, après que les Juifs avaient quitté le palais, il convoqua celui-ci. Le lendemain celui-ci se précipita à voir sa majesté et lui demanda la raison de cet appel. Le bey lui dit:

    « Puisque vous allez tous les jours prier à la Mecque, comme vous le dites, je vous prie de me rendre un petit service. » Sidi Mahrez tout heureux de pouvoir rendre un service à sa majesté le bey lui demanda quel serait ce service. Le bey lui dit:

    « Allez voir les leaders juifs que vous connaissez et ils vous donneront tous les renseignements pour acheter le deuxième bracelet. » Sidi Mahrez était un grand ami des Juifs et ceux-ci l’avaient maintes fois prié d’intervenir pour eux auprès du bey, mais sans succès. A chaque occasion ils demandaient à Sidi Mahrez de leur procurer la permission d’habiter dans l’enceinte de la ville. Malgré l’amitié qui existait entre eux, celui-ci n’avait jamais pris sérieusement le temps de résoudre ce problème. Cette fois-ci Sidi Mahrez avait bien compris que ses amis juifs l’avaient coincé. Il alla les voir et leur demanda:

    « Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire du bracelet de la Mecque? » Les Juifs lui répondirent:
    « Cher Sidi Mahrez, avec tous nos respects, cela fait bien des mois que nous vous demandons de parler au bey pour qu’il nous permette d’habiter la ville, hélas nos demandes n’ont jamais eu aucune suite de votre part. » Sidi Mahrez se voyait dans l’embarras avec le bey s’il ne pouvait satisfaire ce service, d’apporter le bracelet que sa majesté lui demandait. Comme il disait au bey qu’il priait tous les jours à la Mecque il n’avait pas d’excuse de ne pas lui apporter ce bracelet. Sidi Mahrez enfin prit l’affaire très sérieusement et donna sa parole aux Juifs de leur apporter la permission du bey dans quelques semaines, si eux de leur côté lui remettaient le deuxième bracelet. Les Juifs, contents d’avoir réussi leur coup lui remirent le bracelet. Le lendemain Sidi Mahrez rentra chez le bey avec le bracelet en main et tout fatigué du voyage imaginaire il fit:

    « Votre Majesté! » puis il jura en arabe dans ces termes: « Bel Ahram je n’irais plus prier à la Mecque, » et tout essoufflé il remit le bracelet au bey.             Quelques semaines passèrent et voilà que l’occasion qu’il attendait se présenta naturellement. Ce jour-là le bey était d’une excellente humeur, Sidi Mahrez ne laissa pas l’occasion passer et dit au bey:

    « Ya Sidi, que pensez-vous de laisser la Huira des Juifs habiter la ville? » Le bey qui n’avait que de bons souvenirs des Juifs, répondit:
    « Vous avez raison, ils sont toujours gentils avec les autorités, pourquoi pas » et il continua:
    « Ya Sidi Mahrez, et bien, laissons la Huira juive habiter Tunis. » Depuis, le ghetto juif s’appelait « La Hara » (Hara veut dire quatre, et le mot Huira veut dire quelques-uns) dans ce cas, cela veut dire « les quelques Juifs ». Depuis ce temps-là, les Juifs avaient construit la Hara qui s’étendait depuis Sidi Khlef jusqu’à Sidi Mardoum. C’est ainsi que le quartier juif était né.

Hélas du temps de Ben Ali les autorités tunisiennes avaient détruit tout le quartier juif de la Hara avec des bulldozers effaçant ainsi toutes les traces d’une communauté vibrante. .

Copyright 2007 Emile Tubiana

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