mardi 19 février 2019

Antisémitisme: le retour de la peste...de Laurent Joffrin ...


Cette fois, les habituelles indignations ne suffisent plus. Bien sûr, il faut dénoncer, stigmatiser, manifester. Bien sûr il faut sonner l’alarme quand on constate la terrible résurgence, après deux ans d’accalmie, des actes antisémites en France. Bien sûr, il faut répéter, comme nous l’avons fait hier, que les insultes proférées contre Alain Finkielkraut sont insupportables et que les opinions du philosophe, quoi qu’on en pense par ailleurs, n’ont rien à voir là-dedans : ce n’est pas par goût de la joute intellectuelle que des manifestants se sont attaqués à lui, mais bien en raison de sa qualité de Français juif, ce qui signe l’agression raciste.
L’inquiétude supplémentaire vient d’un phénomène plus insidieux que la persistance – déjà honteuse – de réflexes antisémites en France : elle vient de l’abaissement des défenses immunitaires de la société et d’une partie de la scène politique face à ce retour de l’immémoriale peste. Comment comprendre que des leaders à gauche de la gauche soient si lents à condamner ces agressions, quand au contraire une Clémentine Autain a réagi immédiatement ? Comment comprendre qu’un Thomas Guénolé, candidat aux européennes, cherche, par la bande, à rendre la victime responsable de son sort et refuse de «le plaindre» ? Comment comprendre qu’une partie de la gauche radicale tresse des couronnes à une Houria Bouteldja, quand son livre, sur ces questions, souffre pour le moins d’ambiguïté ?
Même interrogation avec le mouvement des gilets jaunes. Citée par le Monde, une manifestante prononce une phrase terrible : «Quand ils chantent la quenelle, on ne dit rien, au nom de la tolérance.» Est-elle représentative, qui est ce «on» dont elle parle et quelle est cette «tolérance» à l’intolérable ? On ne sait, mais dans ce mouvement où personne ne représente personne, ce qui autorise tout le monde à dire n’importe quoi, on n’entend guère de condamnation des dérapages antisémites. Ce qui revient à les promouvoir au rang d’opinions comme les autres.
Comme si, quand on est contre «le système», il devenait tout naturel d’attaquer aussi les juifs, qu’une tradition meurtrière assimile à la classe dominante. Cette perte de mémoire débouche sur une perte de repères, sur un relativisme byzantin, sur une répudiation de l’universalisme, seul rempart solide contre racisme et antisémitisme. Peut-être, au-delà d’actes que la justice doit rapidement sanctionner, est-ce le principal motif d’angoisse pour tous les défenseurs d’une République ouverte et fraternelle.
LAURENT JOFFRIN

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