Selon les analystes, Téhéran ne devrait pas ployer rapidement, espérant voir arriver une nouvelle administration américaine en 2020...
Les responsables israéliens ont célébré lundi l’imposition par les Etats-Unis des sanctions les plus dures jamais appliquées à l’Iran comme étant une « journée historique » et un « changement en profondeur » au Moyen-Orient.
« C’est un grand jour pour l’avenir d’Israël », s’est extasié le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui a ajouté que l’impact de ces nouvelles sanctions se ressentait déjà « dès à présent sur le terrain ».
Mais les analystes israéliens, notamment ceux favorables aux politiques de Netanyahu ainsi qu’aux sanctions iraniennes, affirment pour leur part qu’il n’y a aucun moyen de savoir comment va s’achever cette partie de bras de fer entre le régime islamique et les Etats-Unis. Même les Iraniens peuvent l’ignorer encore même s’ils en sauront probablement davantage dès mercredi, après que le calme soit revenu à l’issue des élections de mi-mandat.
« Les Iraniens sont extrêmement intéressés par les résultats du scrutin de mi-mandat américain [qui a lieu mardi]. Si les républicains enregistrent un mauvais score, les Iraniens pourront nourrir l’espoir de survivre à Trump. Mais si les républicains obtiennent un bon résultat, ou s’ils sont au coude à coude avec les démocrates, alors ils s’inquiéteront », commente Meir Javedanfar, spécialiste de l’Iran au centre interdisciplinaire de Herzliya.
Il y a peu de doute sur le fait que la dernière série de sanctions – qui s’attaque aux industries bancaires et pétrolières de la république islamique – va avoir un impact négatif sur l’économie du pays et qu’elle pourrait bien encore exacerber les agitations qui traversent d’ores et déjà de vastes pans de la population.
Il est toutefois difficile d’affirmer qu’elles seront suffisantes pour renverser le régime de Téhéran ou même le contraindre à renégocier un nouvel accord nucléaire.
« Des hauts-responsables iraniens qui disent que les sanctions n’ont pas d’effet, cela ne signifie pas qu’elles ont raté leur but et que l’Iran n’en souffre pas. Et le ministre iranien des Affaires étrangères [Javad Zarif] qui dit que son pays est prêt à négocier avec les Etats-Unis si l’administration américaine change son approche, cela ne signifie pas non plus que les sanctions ont atteint leur objectif et que l’Iran a ployé sous la pression », explique Raz Zimmt, un expert de l’université de Tel Aviv.
« C’est un long conflit et il ne fait que commencer », ajoute-t-il.
Quoi qu’il en soit, les Iraniens ne vont pas s’empresser de céder aux demandes américaines parce qu’ils ont le sentiment d’avoir adhéré à l’accord sur le nucléaire de 2015 dont les Etats-Unis se sont retirés de manière unilatérale, poursuit Javedanfar.
« Je serais surpris si l’Iran montrait la volonté de trouver un compromis avant les élections présidentielles américaines de 2020 », note-t-il.
« Si Trump l’emporte en 2020, alors l’Iran devra connaître des années très dures et c’est à ce moment-là, probablement, que l’Iran pourrait songer à négocier ».
Mais si c’est un démocrate qui fait son entrée à la Maison Blanche, alors l’Iran pourra espérer un accord bien meilleur – peut-être une reprise du JCPOA (Joint Comprehensive Plan of Action) qui avait été défendu par Obama, dit-il.
Soli Shahvar, directeur et fondateur du centre Ezri pour l’Iran et le Golfe persique à l’Université de Haïfa, reconnaît que les Iraniens nourrissent l’espoir de voir désignée « une nouvelle administration américaine avec des politiques similaires à celles d’Obama », qui serait bien plus disposée à négocier un autre accord plus conforme au goût de Téhéran.
« Dans les deux années à venir, on va savoir dans quelle direction on va », explique-t-il. « Et deux ans, c’est une période courte au Moyen-Orient ».
Mais il fait remarquer la mauvaise situation économique de l’Iran et qu’il est possible que la colère du public, entraînée par les difficultés financières et les politiques du régime, puisse déboucher sur un soulèvement qui marquerait la fin du régime islamique d’ici quelques années.
« Le régime iranien n’est pas dans une bonne position », conclut-il.
Le général de division à la retraite Yaakov Amidror, ancien conseiller à la sécurité nationale de Netanyahu, estime que cela vaut la peine de voir si les sanctions pesant sur l’Iran seront suffisantes pour amener le pays à réviser son soutien au terrorisme et pour le déterminer à renégocier l’accord sur le nucléaire.
Amidror reconnaît le manque de soutien international à la reprise de ces sanctions, et que les dispenses temporaires américaines qui ont été accordées à huit pays qui pourront continuer à acheter du pétrole iranien sont loin d’être idéales.
« Il était possible de mieux faire les choses. Mais on va essayer de voir si ça fonctionne », commente-t-il.
« S’ils ne tentent rien, alors on saura jamais », ajoute-t-il. « Quelle est l’alternative, est-ce de bombarder l’Iran ? On pourra toujours le faire plus tard ».
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