samedi 4 mai 2013

Intervenir en Syrie : avoir des couilles ou de la cervelle ?


Du rififi en Syrie. Pour la Maison-Blanche, l’usage d’armes chimiques était une sorte de ligne rouge à ne pas franchir. Ces armes chimiques, semble-t-il, ont été utilisées. 
Et après ? 
Le grand flou. D’une manière ou d’une autre, tout le monde est concerné, de près ou de loin, par cette guerre civile, énième printemps arabe, mais n’ayant que peu de rapports avec ses homologues locaux.
 Les grandes puissances concernées sont au nombre de cinq : Israël, USA, Russie, Turquie, Iran… Chacune a sa partition à jouer dans cette cacophonie.
Déjà, il faut faire le deuil du nationalisme arabo-laïque de type nassérien et baasiste, produit issu de l’arrière-boutique de la chute de l’Empire ottoman et de la guerre froide. 
Et là, c’est l’histoire qui reprend ses droits et la géopolitique, le « Grand Jeu », qui se réinvite à la table.
Israël : la Syrie de Bachar el-Assad était son meilleur ennemi. Aider à le chasser, pourquoi pas ? 
Mais pour obtenir quoi, au bout du compte ? Un régime salafiste incontrôlable, ou une guerre civile qui n’en finirait pas. 
Dans ces deux cas de figure, c’est jouer à qui perd gagne.
USA : Barack Obama, tenu par son vrai/faux ami israélien, se trouve pris au piège de sa propre dialectique – ligne rouge des armes chimiques. S’il intervient en Syrie, il joue contre les intérêts américains. 
S’il ne le fait pas, il perd toute crédibilité vis-à-vis de ses alliés. Nœud d’autant plus gordien que les véritables enjeux sont ailleurs, dans le Pacifique, visant à contrer l’inquiétante montée en puissance économique et politique de la Chine.
Russie : pour Vladimir Poutine, la problématique est plus simple. 
Conserver son unique base militaire en Méditerranée, se méfier de révolutions par nature incontrôlables et contenir l’influence turque, son rival de toujours.
Turquie : le Premier ministre turc, Recep Erdoğan, tente de renouer avec la tradition de realpolitik de l’Empire ottoman d’antan – la preuve en est sa réconciliation surprise avec les Kurdes – et se voit comme un Bismarck turc, capable de se réconcilier avec Israël alors que les ponts paraissaient coupés pour longtemps. 
Ce d’autant plus que le pays sunnite le plus puissant de la région ne peut tolérer la persistance d’un arc chiite allant de Téhéran jusqu’à Beyrouth en passant par Damas.
Iran : ce n’est pas pour rien que les Perses ont inventé le jeu d’échecs. Et contrairement à ce qu’il est souvent prétendu, les « fous de Dieu » sont plus à chercher dans les colonies israéliennes que du côté de Téhéran. 
Face à l’alliance contre-nature, mais finalement logique, entre Israël et Arabie saoudite, le régime des mollahs tient à cette profondeur géostratégique lui permettant d’influer aussi sur la politique libanaise, cœur de la région. 
Seul problème : Damas. Ce qui oblige, paradoxe ultime, ce régime religieux à voler au secours de celui de Damas, chiite alaouite – hérétique, donc – et laïc de surcroît.
Au bout du compte, pour les nations concernées, il est urgent d’agir, mais il est encore plus pressant de ne rien faire. 
Aller dans l’Orient compliqué avec des idées simples, assurait le général de Gaulle. Sauf que là, les solutions possibles sont plus que complexes.
Nicolas Gauthier, le 3 mai 2013

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