dimanche 17 juillet 2011

Commémoration de la Rafle du Vel d’Hiv par Jean-Marc Moskowicz





Commémoration de la Rafle du Vel d’Hiv par Jean-Marc Moskowicz


Simon Goldstein 2 ans, Bernard Goldstein 7 ans, Georges Goldstein 8 ans, Dora Binenstock 5 ans, Henri Binenstock 9 ans, Chana Binenstock 12 ans, Paul Skorupka 5ans, Samuel Skorupka 6 ans, les jumeaux Jacon et Henri Skorupka 8 ans, Denis Cynaber 6 ans, Lucien Cynaber 10 ans, Georges Cynaber 12ans, Ginette Moszkowisz 2 ans, Rachel Moszkowisz 10 ans, Marcelle Moszkowisz 11 ans, Marguerite Jakubovitch 2 ans, Armand Jakubovitch 4 ans, Rebecca Jakubovitch 6 ans, Anna Jakubovitch 7 ans,……..

C’est le second convoi par lequel les petits enfants juifs quittent la France vers le plus terrifiant des voyages : 207 garçons et 323 fillettes de moins de 16 ans.

Le 16 juillet 1942 à 4 heures du matin débute la plus grande arrestation massive des Juifs réalisée en France durant la Seconde Guerre mondiale.

La rafle a été préparée de longue date. Depuis la Conférence de Wannsee, en janvier 1942, Eichmann organise les convois de déportation dans toute l'Europe. Il sollicite les représentants nazis dans les territoires occupés pour exécuter des rafles et organiser des convois vers Auschwitz.

En France, c'est le SS Obersturmführer Danneker, le chef du service juif du SD en France occupée de fin 1940 à juillet 1942, qui est chargé d'organiser la rafle. Il est sous les ordres du général Oberg, chef des SS et de la police allemande en France. Eichmann est venu les voir à Paris et déclare : « Le rythme prévu jusqu'ici de trois transports hebdomadaires contenant chacun 1000 Juifs devra être intensifié rapidement, en vue de libérer totalement et le plus vite possible la France de ses Juifs. » (Compte-rendu rédigé par Eichmann, à l'issue de sa visite de 48 heures à Paris, 1er juillet 1942).

Pour cela, il négocie avec la police française qui accepte de collaborer et d'organiser seule la rafle !

Les policiers Jean Leguay (délégué de la Police de Vichy en zone occupée) et René Bousquet (secrétaire général de la Police française) négocient avec Dannecker. Ils mettront la police française à la disposition des Allemands pour faire la rafle.

Ainsi, le 10 juillet 1942, Dannecker télexe à Eichmann que la rafle sera conduite par la police française du 16 au 18 juillet et que l'on peut s'attendre à ce qu'il reste environ 4 000 enfants après les arrestations.

En fait, seule la police française et quelques officiers nazis seront dans les rues, les soldats allemands ont presque disparu de la circulation durant deux jours. Ils laissent faire leurs amis policiers français.

Les policiers français, dès l'aube, frappent à la porte des appartements où on leur a dit d'arrêter les Juifs. Ils les conduisent ensuite vers des autobus. De là, ils sont emmenés au Vélodrome d'hiver.

Le Vélodrome d'hiver, en abrégé « Vél' d'hiv' », était comme son nom l'indique une piste pour des courses de vélos, dans un stade couvert.

C'est là, dans les gradins, que furent emmenés les Juifs arrêtés. Le lieu fut choisi parce qu'il pouvait contenir un grand nombre de personnes.

Dans tout Paris, des cars de police sillonnent les rues. Les policiers investissent les immeubles et les pavillons, réveillent les familles, les obligent à faire hâtivement leurs bagages avant de les emmener dans les camions qui les mèneront au centre de rétention. Parfois, des suicides se produisent : une mère jette ses enfants par la fenêtre du quatrième étage et les rejoint dans la mort, une autre petite fille fait de même, un médecin de Montreuil s’empoisonne avec sa famille. Les rumeurs couraient en effet depuis quelques jours sur une "grosse opération" contre les Juifs. Mais rares seront ceux qui avaient pris les mesures adéquates en vue d’échapper à la rafle. "Si on nous en donnait le pouvoir, on les trouverait bien, tous ces juifs qui restent planqués chez eux", s’exclamera un agent de police.

"Si nous avions su que c’était pour faire ce travail !" reconnaîtra toutefois un autre garde mobile. La plupart d’entre eux sont jeunes, ou anciens prisonniers de guerre et, dans l’ensemble, la police française s’acquitte de sa tâche sans zèle particulier, sans véritable opposition non plus, souvent avec brutalité. Quelques cas de compassion seront néanmoins recensés.
Les familles sans enfants sont immédiatement envoyées à Drancy, tandis que les familles avec enfants sont parqués au Vel d’Hiv’, le complexe sportif de la rue Nélaton.

Prévu pour abriter 12.000 personnes, l'établissement en reçoit 7.000, dont 4.051 enfants… dès le premier jour de la rafle !

Les conditions d’accueil sont indescriptibles : pas de nourriture, pas de place, pas assez de sanitaires, une ambiance de terreur et de chaos. "La nuit, relate un rescapé, nous étions tous recroquevillés pour dormir et beaucoup de personnes criaient. C’était affreux."
Un médecin dépêché sur les lieux relate : "L’atmosphère était tellement saturée de poussière qu’elle devenait par moments irrespirable et provoquait des phénomènes de conjonctivite". La chaleur estivale est écrasante.
André Baur, qui dirige l’U.G.I.F. sur Paris (l'Union générale des Israélites de France, le "conseil juif" instauré à l'initiative allemande), a l’occasion de rendre visite au Vel d’Hiv’, dans l’après-midi du 16 juillet, soit le premier jour de la rafle parisienne :

"La vaste enceinte grouille de haut en bas. Avant d’y pénétrer, nous voyons à l’extérieur dans une courette un pompier distribuer de l’eau à des enfants, au bout d’un tuyau d’incendie qui s’alimente dans la rue. Il n’y a donc pas d’eau à l’intérieur. Dès l’entrée, de nombreux ballots épars, des hardes enveloppées dans des édredons ficelés, des valises, des sacs de tous genres. Interrogés, les gendarmes répondent : objets perdus. Nous pénétrons sur la piste centrale par le tunnel. Spectacle. Une foule énorme dans des tribunes où les fauteuils paraissent tous occupés.
A l’examen, on constate des milliers de gens assis, occupant avec leurs ballots et valises les fauteuils autour d’eux. Sur le terre-plein central, des enfants courent et semblent jouer, pourchassés par des gendarmes qui ont l’ordre de les faire remonter dans les gradins. De temps en temps, des jeunes gens apportent des baquets d’eau et tous s’y précipitent pour remplir leurs quarts, leurs casseroles, ou de simples boîtes de conserve. Sur la piste, à droite en sortant du tunnel, des brancards sont posés où geignent des femmes et des enfants étendus.
Dans une petite enceinte à gauche, la Croix-Rouge a installé une ambulance où s’affairent des infirmières et les deux médecins. On a l’impression qu’il n’y a que des enfants et des malades. Pour cet ensemble, on n’a amené qu’une cinquantaine de brancards et matelas. [...] Une femme, devenue folle, est liée sur un brancard ; une autre a cherché à tuer son enfant avec une bouteille. Un autre enfant fut amené, les veines du poignet presque sectionnées par sa mère."

"Cependant, mon petit frère et moi avions soif. Nous voulions aller aux cabinets. Mais impossible de passer dans les couloirs de sortie et, comme les autres, nous avons dû nous soulager sur place. Il y avait de la pisse et de la merde partout. J’avais mal à la tête, tout tournait, les cris, les grosses lampes, suspendues, les haut-parleurs, la puanteur, la chaleur écrasante. Assise près de nous sur les gradins, une femme très belle serrait un petit garçon de deux ans dans ses bras. Un garçon aux boucles brunes, au teint mat délicatement rosé.Annette Muller, survivante, témoigne:

Je voyais sa mère l’enlacer sauvagement, couvrir son visage de baisers. Je pensais : comme elle l’aime. Il n’y avait plus rien à boire et à manger. Un jour, des femmes au voile bleu sur la tête ont distribué de la nourriture. Au milieu des cris et de la bousculade, on nous donna une madeleine et une sardine à la tomate. J’ai grignoté le dessus bombé de la madeleine en laissant fondre lentement les miettes sucrées dans ma bouche, j’ai mangé la sardine en léchant d’abord la tomate qui la recouvrait.
C’était délicieux. Je ne me souviens pas avoir mangé autre chose au Vel d’Hiv’. Rien d’autre. Après, nous avons eu très soif. Les lèvres et la langue étaient desséchées, mais il n’y avait rien à boire. Sur les gradins, près de nous, une femme s’est subitement affaissée. Elle était morte."

12 884 Juifs sont arrêtés : (4 051 enfants, 5 802 femmes et 3 031 hommes). Un nombre indéterminé, prévenu par la Résistance ou bénéficiant du manque de zèle de certains policiers, parvient à échapper à la rafle.

Selon la préfecture de police, le nombre d'individus arrêtés s'élève à 13 1525. C'est aussi ce nombre qui est gravé sur la stèle commémorative située à l'emplacement du vélodrome. Sur les 13 152 juifs raflés, seuls 25 adultes et quelques enfants ont survécu.

Le 16 juillet 1995, le président Jacques Chirac a reconnu devant le monument commémoratif la responsabilité de la France dans la rafle et dans la Shoah. Il a notamment déclaré :

« Ces heures noires souillent à jamais notre histoire, et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l'occupant a été secondée par des Français, par l'État français.
Il y a cinquante-trois ans, le 16 juillet 1942, 4 500 policiers et gendarmes français, sous l'autorité de leurs chefs, répondaient aux exigences des nazis.
Ce jour-là, dans la capitale et en région parisienne, près de dix mille hommes, femmes et enfants juifs furent arrêtés à leur domicile, au petit matin, et rassemblés dans les commissariats de police.
La France, patrie des Lumières et des Droits de l'Homme, terre d'accueil et d'asile, la France, ce jour-là, accomplissait l'irréparable. Manquant à sa parole, elle livrait ses protégés à leurs bourreaux. »
Aujourd’hui, 17 juillet 2011 peut-on encore commémorer la Rafle du Vel d’Hiv quand dans certains établissements scolaires il n’est déjà plus possible d’enseigner l’histoire de la Shoah ?
Combien de temps encore pourrons-nous commémorer la Rafle du Vel d’ Hiv et la déportation avant que la mémoire disparaisse au profit d’un clientélisme nouveau refusant toute évocation des Juifs en France ?

Déjà des manuels d’histoire de certains éditeurs omettent de parler de la Shoah, effaçant ainsi de la mémoire collective l’histoire des Juifs en France, une histoire vieille de 2 000 ans pendant lesquels les Juifs furent toujours présents sur le territoire national.

Aujourd’hui plus que jamais le devoir de mémoire est important car le danger n’est pas tant l’oubli que l’on craignait quand les derniers survivants auront disparus mais bien l’effacement pur et simple de la mémoire française de la présence des Juifs et de leur déportation.

De l’extermination d’hier jusqu’au révisionnisme historique d’aujourd’hui l’œuvre commencée par Hitler semble avoir trouvé de nouveaux relais.

Depuis plus de 2000 ans, la folie irrationnelle de l’esprit humain se focalise sur le peuple juif pour tenter de le faire disparaître. Cela relève de la psychanalyse de groupe. Le peuple juif est devenu le « bouc émissaire » par essence, coupable de tous les maux, de toutes les misères, de toutes les calamités qui s’abattent sur le reste de l’humanité.

Beaucoup se sont interrogés depuis la Shoah sur la complicité silencieuse des peuples, des populations occupées, des gouvernements.

Cette complicité d’une partie de l’Europe reste un mystère au regard de l’Europe des Lumières, des valeurs des Droits de l’Homme, des valeurs mêmes du judéo-christianisme.

Si une seule leçon peut-être tirée de la Shoah c’est celle de l’irrationnelle folie du Monde qui, en certaines conditions, peut focaliser toute sa haine sur un peuple si petit soit-il. Phénomène de masse, fonction nécessaire à toute société que celle du bouc émissaire ?

Ainsi Hitler dans « Mein Kampf » désigne pour cause de la situation tragique du peuple Allemand les juifs et le fameux complot juif mondial.

Au-delà du peuple Allemand, une partie de l’Europe s’est ralliée à cette idée que les malheurs du monde étaient dus à ce peuple juif et ainsi devenait complice de l’extermination.

Aujourd’hui se dessine au niveau planétaire le même schéma : Israël devient le fameux « bouc émissaire » mondial, focalisant tous les ressentiments, toutes les haines, toutes les frustrations des peuples.

Si l’on peut facilement comprendre qu’une partie du tiers monde et des peuples arabes, volontairement maintenus dans l’obscurantisme et l’absence de culture et d’éducation, n’ait pas les « armes » intellectuelles nécessaires pour comprendre que si l’on désigne Israël comme bouc émissaire c’est pour mieux occulter à quel point les dirigeants de ces pays maintiennent leur peuple en état de sous-développement, il n’en est pas de même pour l’Occident et les pays développés.

Or l’on assiste bien à une nouvelle « bouc émissairation » d’Israël désigné comme le pays responsable de tous les maux planétaires, fonction qu’occupait précédemment le peuple juif.

Israël n’est autre que le pays des juifs et par glissement, parce qu’après la Shoah il ne serait pas politiquement correct de continuer à s’en prendre aux juifs, c’est donc naturellement le pays des juifs, l’Etat Juif lui-même qui est désigné pour occuper cette fonction.

Alors que le monde arabo-musulman focalise sa violence contre Israël, le même phénomène saisit l’Occident par « capillarité ».

La vieille Europe, en proie à une crise économique mais aussi une crise de ses propres valeurs, s’est à son tour lancée dans la désignation d’Israël comme responsable de tous les maux et coupable par essence.

Comme pour la Shoah, l’Occident devient ainsi complice de cette entreprise irrationnelle de destruction à terme de l’Etat d’Israël car, ne nous y trompons pas, à terme il s’agira bien de détruire cet état paria, comme l’on a tenté de détruire ce peuple maudit.

Une irrationnelle folie mondiale coure sur tous les hémisphères. Irrationnelle car aucune des accusations contre Israël n’est fondée. Il suffit d’un œil objectif et d’une connaissance des faits et de l’histoire pour comprendre que rien de ce qui est reproché à Israël n’est fondé.

Déjà certains manuels d’histoire sont manipulés de façon propagandiste afin de présenter l’Etat d’Israël comme un Etat illégitime au Moyen Orient. Cette nouvelle forme de révisionnisme après avoir touché la Shoah s’attaque aujourd’hui à l’Etat Juif cette fois par pur clientélisme afin de ne pas froisser certains élèves d’origines étrangères.
Près de 10 000 Juifs n'ont pas été arrêtés pendant la Rafle du Vel d'Hiv grâce à des Parisiens courageux qui les ont aidés. Nombre de français se sont illustrés en protégeant et sauvant des familles juives.
Le peuple français attaché à son histoire et sa culture saura comprendre les aspirations du peuple Juif à ne pas voir son histoire bafouée et disparaitre de la mémoire nationale française.

Jean-marc MOSKOWICZ

A mon père, l'un des derniers survivants de la Rafle du Vel d'Hiv, arrêté le 16 juillet 1942 à l'age de 10 ans avec sa mère et son frère.

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