samedi 12 novembre 2016

Antisémitisme sur Twitter : le procès du directeur de Rivarol a eu lieu.....


Jérôme Bourbon était au TGI de Paris, ce mercredi 9 novembre. Il était poursuivi pour incitation à la haine raciale et contestation de crime contre l’humanité.

En mars dernier, Hervé Ryssen, essayiste nationaliste, a été condamné à deux mois de prison ferme pour deux tweets antisémites. C’est le moment où Jérôme Bourbon, directeur du journal d’extrême droite Rivarol, a pris peur. Poursuivi lui-même pour deux séries de tweets antisémites, il a compris qu’il risquait gros.


Quelques semaines plus tard, il a complètement arrêté Twitter, mais n’a supprimé ni ses tweets ni son compte, estimant que cela le ferait passer pour un « pleutre ». Pas un seul tweet n’a été posté ces six derniers mois, pour arriver relativement « clean » à son audience, qui s’est tenue ce mercredi 9 novembre.

Le directeur de Rivarol est poursuivi pour incitation à la haine raciale et contestation de crime contre l’humanité. Notamment pour avoir tweeté, en juillet 2015 :
« Triste époque : les gens ne croient pas en Dieu ni en l’Enfer mais ils croient aux chambres à gaz sans les avoir vues. »

Dans un autre dossier (jugé en même temps), il doit répondre de provocation à la haine raciale, après une série de tweets ayant suivi la nomination de Laurent Fabius au Conseil constitutionnel en février 2016.
« Laurent Fabius président du Conseil constitutionnel après Michel Debré, petit-fils de rabbin et après Robert Badinter ! Le Palais royal est devenu un territoire occupé. »

Voici ce qu’il faut retenir du procès en cinq points.

1
L’ombre de Donald Trump planait
En début d’après-midi, devant la XVIIe chambre du TGI de Paris, Jérôme Bourbon assure que sa bonne humeur ne pourra pas être entamée aujourd’hui. Donald Trump, le « Jean-Marie Le Pen américain », a été élu. Le directeur de Rivarol a passé la nuit à observer la « mine décomposée » des journalistes. Pour voir la mienne se décomposer aussi, il se met à décrire la « jouissance inouïe » qu’il a ressenti. De type « geyser ».

« C’est la revanche du mâle blanc hétérosexuel. »
Plus tard, pendant l’audience, l’élection de Trump sera évoquée plusieurs fois. Jérôme Bourbon l’utilisera pour mettre en garde le tribunal contre le « politiquement correct » :
« Attention, trop, c’est trop. Qu’on ne s’étonne pas, ensuite, du phénomène Trump. »
De son côté, l’avocate de la Licra préviendra le tribunal :

« Ce n’est pas parce que sa pensée extrémiste est folle, son propos absurde et son attitude gaguesque qu’il ne faut pas le prendre au sérieux. On a constaté aujourd’hui que ces gens là pouvaient malgré tout arriver à leur fin. »
2
Un antisémitisme décomplexé
Selon la procureure de la République, il est rare d’entendre à la barre des antisémites aussi décomplexés. En général, ils « dissimulent ».
« Au moins, monsieur Bourbon assume ce qu’il pense. »
Au début du procès, Jérôme Bourbon a bien essayé trois minutes de faire croire au tribunal que s’il avait réuni Robert Badinter, Michel Debré et Laurent Fabius dans un même tweet, c’est parce que tous trois étaient des « sionistes flamboyants ». Mais il a très vite renoncé :

« Ça peut aussi concerner leur origine juive, oui. »
Il a aussi répété, plusieurs fois, qu’Eric Zemmour était juif et qu’il l’appréciait. Mais ça n’a pas passionné le tribunal.
A part ces deux micro-tentatives, le directeur de Rivarol a tenu un discours antisémite tout à fait désinhibé (la communauté juive favorisée, protégée, dominatrice, matraquant le « dogme holocaustique »).

A un moment, c’est sorti de nulle part, il s’est même félicité à voix haute de ne pas avoir eu à assister, lorsqu’il était collégien, à des conférences de déportés prêchant la « bonne parole » dans les classes.
Quand une magistrate lui a demandé s’il croyait ou non à l’existence des chambres à gaz, il a commencé par minauder :
« Je ne répondrai pas à cette question. La loi m’interdit de ne pas y croire. Même l’expression d’un doute est un délit. »

Avant d’y aller franchement :

« Mais je note qu’aucune expertise médico-légale n’a été faite, ni de l’arme du crime, ni de la scène du crime. »
Et :
« J’ai beaucoup d’estime pour le professeur Faurisson. J’apprécie le courage d’où qu’il vienne. »
« Se considère-t-il antisémite ? »
« C’est un mot piégé. Comme l’a dit un jour Pierre Sidos [fondateur de l’Œuvre française, ndlr], ni plus ni moins que Saint-Louis. »
3
La tribune contre la loi Gayssot
C’est un classique dans ce type d’audience. Jérôme Bourbon a passé son temps à argumenter/pleurnicher contre la loi Gayssot.
« C’est une loi liberticide, totalitaire et scélérate. »
En début d’après-midi, en attendant son procès dans la salle d’audience, il relisait en boucle un vieil édito de Rivarol sur le sujet. Essayant visiblement de retenir les arguments par cœur. Une fois à la barre, il est prêt et bombarde les magistrats. Comparant, par exemple, la loi Gayssot au délit de blasphème,
« qui, lui, a été abrogé en Alsace. »

Lors de son audition, Jérôme Bourbon parle encore plus fort et plus vite qu’à son habitude (plusieurs fois, les magistrates lui ont demandé de se calmer pour la greffière). Disant tout et n’importe quoi :
« Pour ce genre de tweets, on sera bientôt déporté à Tel-Aviv et pendu. »
4
Ou passant d’un sujet à l’autre :

« Je préfère la France catholique à la France de l’avortement légalisé et remboursé à 100%. »
De leur côté, les avocats des parties civiles ont tous insisté sur le fait que la contestation de crime contre l’humanité avait été commise sur Twitter. Un lieu où la viralité « n’est plus à démontrer ». L’avocate de la Licra :
« Le fait que ces propos étaient tenus sur Twitter leur donnent beaucoup de plus de pouvoir de nuisance que dans le brulot pro-nazi qu’est Rivarol. Le seuil de gravité est beaucoup plus élevé. »

La personnalité de Jérôme Bourbon a ensuite été examinée par le tribunal. Les magistrats ont rappelé qu’il avait été plusieurs fois condamné pour des faits similaires, ces cinq dernières années (incitation à la haine, contestation de crime contre l’humanité).
Le directeur de Rivarol, marié et père de cinq enfants, a déclaré gagner environ 2 500 euros par mois. 
Le débit un peu plus lent, le ton plus implorant, Jérôme Bourbon a alors assuré au tribunal qu’il ne retournerait pas sur Twitter :
« Je n’ai pas le dos assez large pour avoir des procès toutes les semaines. Et comme la Licra veille, on va vite à la prison. Si je peux éviter, je préfère… Ça éviterait que ma femme ait à s’occuper seule de nos cinq enfants. »

Pourtant, en début d’après-midi, devant la chambre, il m’avait dit :
« Twitter ? J’aurais pu y retourner à l’automne. Peut-être que j’y retournerai. »
Mais face aux magistrats, Jérôme Bourbon semble vraiment craindre une peine de prison. A raison : cette fois, il ne passe pas loin. Dans sa plaidoirie, l’avocate d’Avocats sans frontières a demandé une peine rédhibitoire, après toutes ses condamnations qui « n’ont pas marché » :

« Comment l’arrêter ? Cela fait 20 ans que sa haine antisémite le nourrit lui, sa femme et ses enfants. Nous demandons une sanction d’ordre pénal de façon à ce qu’il arrête définitivement. »
La procureure a requis 3 mois de prison avec sursis et une amende lourde (200 jours-amende à 200 euros).
5
L’avocat nationaliste
Comme il vaut mieux ne pas être soigné par un médecin qui est aussi un ami, il est préférable de choisir un avocat qui ne soit pas un fan.
Tout au long de l’audience, maître Pierre-Marie Bonneau, avocat toulousain prisé des milieux nationalistes, était tellement tout à fait d’accord avec les idées défendues par Jérôme Bourbon que c’en était gênant. Voici un extrait de sa plaidoirie interminable. Plaintif et sincère :

« Mon client vous dit simplement qu’il considère l’existence d’un dogme choquant ! Que de considérer la Shoah comme une religion est dangereux !
Où voyez vous une mise en doute de l’existence ? Moi je n’en vois aucune. »

Autre moment malaisant : lorsqu’il s’est lancé dans une comparaison de la communauté juive et du Misanthrope de Molière. Il ne se souvenait plus « des vers par cœur ». Mais en gros, Alceste « considère tout ce qu’on lui dit comme une agression ».
Il nous avait prévenu au début de sa plaidoirie :
« Je suis français et je suis un peu littéraire parfois. »
Le jugement du tribunal sera rendu le 14 décembre.
Source :

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