mardi 14 juillet 2015

"Charlie Hebdo" : "Les victimes policières sont maltraitées"


Le défilé du 14 juillet met à l'honneur les forces de l'ordre qui sont intervenues lors des attentats de janvier. Mais certaines victimes n'y seront pas...


Ingrid Brinsolaro a perdu son mari Franck, officier de sécurité chargé de la protection de Charb, abattu par les frères Kouachi lors de l'attaque perpétrée à la rédaction de Charlie Hebdo le 7 janvier. Alors qu'elle avait été contactée par les autorités pour se rendre à Paris aux cérémonies du 14 juillet, la rédactrice en chef de L'Éveil normand a fini par décliner l'invitation. « Je ne souhaite pas m'étendre sur les raisons qui m'ont poussée à renoncer. Je peux juste vous dire que les victimes de l'attentat issues de la police sont maltraitées et méprisées par le gouvernement. »
À l'appui de son courroux, les mauvaises manières faites à Christophe S., 42 ans, l'équipier de Franck qui, lui aussi, protégeait le patron de Charlie Hebdo. Ce dernier a eu la vie sauve « par hasard ». Le brigadier du service de la protection (SDLP, ex-SPHP) accompagnait Charb depuis trois ans. Franck l'avait rejoint en août 2014. Le matin du 7 janvier, Franck Brinsolaro s'était absenté une demi-heure après avoir déposé Charb à la rédaction. À son retour, Christophe S. descend à son tour sur le boulevard Richard-Lenoir acheter un sandwich. Dans l'intervalle, les Kouachi se sont introduits dans les locaux de Charlie Hebdo. Quand le collègue de Franck remonte, il ne peut que constater le carnage.

Évincé du défilé du 14 juillet ?

Après une prise en charge psychologique succincte, le brigadier a repris du service. Il devait lui aussi être invité aux cérémonies du 14 juillet, et même défiler. « Les autorités lui ont ordonné de s'entraîner avec les autres forces de police qui défilent. Il a répété le pas de l'oie et s'est exercé au maniement de l'épée. On lui a même commandé son uniforme à 2 500 euros. Et, au final, alors qu'il a joué le jeu de la hiérarchie qui l'a exhibé pendant cinq mois dans les écoles de police et autres cérémonies officielles, il a été zappé au dernier moment sans aucune justification », explique un syndicaliste du SDLP (Service de protection des personnalités). Contacté par Le Point, Christophe S. n'a pas souhaité s'exprimer : « Je suis tenu au silence par mon devoir de réserve. Je peux simplement vous confirmer que je ne fais pas partie du défilé du 14 juillet. »
Ingrid Brinsolaro a son idée sur les raisons qui ont conduit à l'évincement du collègue de son mari. « J'ai posé de nombreuses questions à Bernard Cazeneuve et aux responsables de la police sur les dysfonctionnements de la sécurité à Charlie Hebdo. On me ment, et à mes enfants aussi », s'indigne-t-elle. Avec son avocat Me Philippe Stepniewski, elle envisage de donner une suite judiciaire à ses doutes.
Il est vrai que des zones d'ombre subsistent. Par exemple, le niveau de la menace contre Charb avait été évalué à 2 par l'unité de coordination de lutte antiterroriste (UCLAT). À ce stade, le patron du SDLP Frederic Auréal aurait dû, comme le veut la règle, placer cinq policiers pour protéger le journaliste, et non deux comme ce fut le cas. Un autre point reste à éclaircir, qui met en cause la hiérarchie du SDLP. Un voisin de Charlie Hebdo, qui venait de voir les frères Kouachi pénétrer dans l'immeuble de la rédaction, a contacté le chef de mission du SDLP, Patrick H, dont il avait la carte de visite. Ce dernier lui aurait répondu : « Je suis en congé. » Tous ces éléments ont été portés à la connaissance des enquêteurs et de la justice. Plusieurs responsables du SDLP ont néanmoins connu une promotion après les attentats, y compris des fonctionnaires en repos. Christophe S., lui, vient de passer brigadier. Avec 30 euros d'augmentation...
Contactée, la place Beauvau assure que des réponses ont été apportées en privé aux interrogations d'Ingrid Brinsolaro. C'est à la demande de Charb que le dispositif de sécurité était de deux officiers, et non de cinq, ajoutent les services du ministère de l'Intérieur. Selon la hiérarchie du SDLP, le chef de mission a bien été alerté de l'intrusion des frères Kouachi dans l'immeuble, mais il était effectivement en repos et a fait le nécessaire pour appeler les secours.

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