mercredi 17 décembre 2014

Un troc russo-américain sur le dos d’Israël ?


Depuis dimanche 14 décembre, on s’attend fort, en s’appuyant sur des rapports non-confirmés qui circulent dans les capitales arabes, à ce que le Président américain Barack Obama, se liguant avec Moscou et Téhéran, retourne sa veste, en ce qui concerne sa politique d’opposition à Bachar al Assad.

On dit qu’il serait décidé à accepter la dictature de Bachar al Assad et à désigner l’armée syrienne comme l’épine dorsale des forces terrestres de la coalition contre l’Etat Islamique en Irak et au Levant.

Si ces attentes sont confirmées par l’Administration Obama, le Moyen-Orient serait confronté à un nouveau bouleversement stratégique : les Etats-Unis et la Russie se trouverait dans le même camp, à un pas d’être en mesure de combler les divergences entre eux, après la profonde rupture concernant l’Ukraine et le rapprochement entre Washington et Téhéran se concrétiserait.

Le Hezbollah libanais et son patron, Hassan Nasrallah, se verrait justifié dans son rôle central qu’il joue jusqu’à présent, en empêchant la chute du Président Assad au pouvoir.

Mais, pour l’Arabie Saoudite et Israël, un revirement complet d’Obama serait une véritable gifle au visage.
Les Saoudiens, aux côtés de la plupart des Emirats du Golfe, ont investi des ressources massives, financières et en matière de renseignements, dans la révolution visant à renverser le dictateur syrien.

Israël ne s’est jamais lancé dans un soutien total au soulèvement syrien, mais s’est focalisé sur la création d’une zone de sécurité militaire sous le contrôle des rebelles dans le Sud de la Syrie, de façon à maintenir l’armée syrienne hostile, le Hezbollah et les éléments du Corps des Gardiens de la Révolution iranienne combattant auprès d’Assad à bonne distance de ses frontières Nord avec la Syrie et le Liban.

Si Obama franchit cette ligne et accepte le régime Assad, Israël devra faire une croix sur l’essentiel de ses investissements militaires en Syrie. Dans tous les cas, les agences de renseignement israélien auraient mal interprété la situation en Syrie depuis le début ; jusqu’à il y a un an, elles ont continué d’insister sur le fait que les jours d’Assad étaient comptés.

Les sources arabes de Debkafile soulignent plusieurs indicateurs, relatifs à cette approche d’un revirement de la politique syrienne de Washington :

1. La démission de Chuck Hagel, en tant que Secrétaire à la Défense, le mois dernier. Hagel était inflexible dans la défense d’un renversement d’Assad.

2. Il n’y a eu guère qu’une phrase consacrée au conflit syrien, dans les résolutions issues du sommet du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), à Doha, la semaine dernière, malgré sa centralité dans les affaires inter-arabes : le sommet en appelait à une « solution politique » du problème syrien qui assurerait « la sécurité, la stabilité et l’intégrité territoriale de la Syrie »

Et pas une phrase qui suggère le renversement d’Assad.

3. Les sources de Debkafile à Washington et Moscou révèlent que le problème syrien devait prendre une large place au cours des discussions de Rome, entre le Secrétaire d’Etat américain John Kerry et son homologue russe, le Ministre des Affaires étrangères Sergey Lavrov, dimanche 14 décembre.

Le Kremlin fait de cette acceptation américaine de son plan visant à mettre un terme au conflit syrien la condition pour rejoindre la ligne américano-européenne, quant aux exigences palestiniennes que la Session du Conseil de Sécurité de l’ONU impose une date-butoir de deux ans à la reconnaissance unilatérale d’un Etat Palestinien dans les lignes de juin 1967 (soit celles de l’armistice de 1949). Ce texte appelle à la fin de « l’occupation du territoire palestinien conquis durant la guerre de 1967 », à la date de novembre 2016.
La France, la Grande-Bretagne et l’Allemagne font, actuellement, des efforts pour élaborer leur propre résolution.

Aussi, tout accord que Kerry et Lavrov serait en mesure de finaliser en vue d’un troc entre les problèmes palestinien et syrien, sera mis sur la table devant le Premier Ministre Binyamin Netanyahu, alors qu’il rencontre le Secrétaire américain à Rome, lundi 15 décembre.
Netanyahu demandera à Washington de faire usage de son droit de veto contre la motion palestinienne. Mais l’Administration américaine pourrait ne pas le faire, puisqu’il soutient, par principe les Palestiniens.
Israël pourrait, cette fois, se trouver confronté à un front uni américano-russe, concernant la question palestinienne, récompense de Moscou pour l’alignement de Washington sur son plan pour la Syrie.

Moscou propose que l’opposition syrienne jette l’éponge et que les deux camps acceptent une trêve – particulièrement dans le cadre de la bataille de longue durée dans Alep – en vue d’une re- convocation de la conférence pour la paix de Genève 2 à Moscou, avec la participation et le soutien américain. Ensuite, des élections provinciales se tiendraient en Syrie, afin d’amener le gouvernement Assad et les éléments de l’opposition à collaborer au sein de diverses institutions administratives.

Le Vice-Ministre russe Mikhail Bogdanov a passé deux jours à Damas, la semaine dernière, afin de travailler sur les détails de ce plan, en compagnie de Bachar al Assad, après quoi il a bien précisé dans ses commentaires « être en contact avec nos partenaires américains ».
Les responsables russes ont ensuite exposé leur plan devant des responsables du Hezbollah et de l’opposition, en Turquie.

Même le projet du Sénat américain, appelant à un nouveau régime de sanctions contre Moscou et la livraison d’une aide militaire d’une valeur de 350 millions de $ à l’Ukraine, dans le cadre de la loi de soutien à la liberté de ce pays, ne va probablement pas faire tanguer le bateau Kerry-Lavrov.
Le Président Obama ne va probablement pas apposer sa signature à ce texte Et Vladimir Poutine l’interprétera comme un accord tacite à sa démarche, s’il perçoit des progrès vers un accord avec les Etats-Unis sur la Syrie.

Même la menace américaine d’installer une station lance-missiles de portée moyenne en Europe, à la suite du refus de Moscou d’approuver le traité sur les Forces Nucléaires de Rang Intermédiaire, n’a pas réussi à jeter une obmre au tableau, durant la rencontre Kerry-Lavrov.

Ces deux diplomates de haut-rang ont bâti une solide expérience en matière de progrès visant à forger des accords diplomatiques sur des problèmes internationaux épineux (comme le programme nucléaire iranien et les armes chimiques syriennes).

Si, cette fois, ils échouent, les discussions entre Netanyahu et Kerry apparaîtront plus légères et plus lisses. Mais si un troc palestino-syrien a été forgé entre les deux grandes puissances, Israël pourrait, pour la première fois se trouver engagé dans une course menant à une collision certaine, contre un front conjoint russo-américain, concernant le problème palestinien.

Netanyahu a dit, lors d’une réunion de cabinet à Jérusalem, dimanche qu’Israël « repoussera tout geste de l’ONU visant à imposer un calendrier à un retrait quelconque des territoires ». Il a déclaré qu’Israël est actuellement confronté à une offensive diplomatique « pour faire pression sur nous », en vue, par exemple, d’un retrait total dans les deux ans.

Par conséquent, les frappes aériennes israéliennes contre une cargaison de missiles russes en Syrie à l’intention du Hezbollah, lundi dernier, le 8 décembre, pourrait être perçu comme un acte de défiance contre ce partenariat des grandes puissances en train de naître. Nos sources révèlent que Moscou n’a pas été le seul à exiger des « explications » pour la supposée « agression d’Israël », car Washington aurait fait de même.


Adaptation : Marc Brzustowski.

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