samedi 16 août 2014

Des blindés russes grillés sur le territoire ukrainien...


Depuis des mois déjà, les armes russes passent à travers la frontière ukrainienne, y compris du matériel lourd, des chars ou des lance-missiles, comme ceux qui ont abattu le 17 juillet le Boeing de la Malaysia Airlines. Les leaders des rebelles séparatistes prorusses, comme Igor Strelkov, leur chef militaire, ou Alexandre Borodaï, «Premier ministre» de l’autoproclamée république de Donetsk - l’un et l’autre désormais démissionnaires -, viennent de Russie et émargent aux services de renseignement russes. Mais un nouveau pas a été franchi avec l’incursion de blindés russes en territoire ukrainien, à l’aube de vendredi, alors que toute l’attention était focalisée sur le convoi «humanitaire» de quelque 262 camions, envoyé par Moscou pour aider les populations de Donetsk et Lougansk. 
Ces villes sont encerclées par l’armée ukrainienne, qui resserre inexorablement son étau sur ces derniers bastions des séparatistes. Les camions étaient toujours bloqués, vendredi en fin de journée, à une trentaine de kilomètres de la frontière, dans une zone où les forces russes - évaluées à 45 000 hommes - multiplient les manœuvres.
«Violation flagrante» Constatée dès l’aube par des journalistes britanniques et l’AFP, l’entrée sur le territoire ukrainien d’une vingtaine de blindés russes, au travers d’un des derniers postes-frontières encore tenus par les séparatistes, a été confirmée par Kiev. 
Moscou a démenti, malgré l’évidence des informations recueillies par l’Otan. «On voit un flot continu d’armes et de combattants depuis la Russie. C’est une démonstration claire de l’implication continue de la Russie dans la déstabilisation de l’est de l’Ukraine», a déclaré, vendredi à Copenhague, le secrétaire général de l’Otan, Anders Fogh Rasmussen. En fin d’après midi, un porte-parole militaire ukrainien annonçait que «la plupart» de ces blindés avaient été détruits.
Cette incursion restera-t-elle limitée ou, au contraire, les réactions déterminées de l’armée ukrainienne pousseront-elles les forces russes à la surenchère pour laver l’affront, alors même que les rebelles prorusses sont en déroute ? Vendredi soir, Moscou accusait Kiev de bloquer délibérément la livraison de l’aide humanitaire en intensifiant ses opérations militaires. 
Pour tenter d’enrayer l’escalade, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Pavlo Klimkine, devrait rencontrer son homologue russe, Sergueï Lavrov, à Berlin dimanche, avec les chefs de la diplomatie français et allemands.
Les Occidentaux s’alarment. «Toute action militaire unilatérale de la part de la fédération de Russie en Ukraine sous quelque prétexte que ce soit, y compris humanitaire, sera considérée par l’UE comme une violation flagrante du droit international», ont mis en garde les ministres des Affaires étrangères des Vingt-Huit depuis Bruxelles, où se tenait une réunion d’urgence à l’origine consacrée à la crise irakienne. «Il s’agit d’une violation majeure du droit international», avait martelé dès le commencement des travaux le Suédois Carl Bildt. 
Depuis le début de la crise - la plus grave entre les Occidentaux et la Russie depuis la fin de la guerre froide -, celui-ci incarne, comme son collègue polonais, la ligne la plus ferme face au Kremlin qui, après avoir annexé la Crimée (lire page 4), soutient les rebelles séparatistes. Désormais, leur voix porte au sein d’une Union longtemps réticente à punir économiquement la Russie, au risque d’en subir les contrecoups. 
Début août, les Vingt-Huit avaient finalement pris des sanctions économiques d’envergure contre Moscou, dont les premiers effets commencent à se faire sentir.
«Prétexte» Cette montée des tensions était prévisible au lendemain du discours étonnamment conciliant tenu par Poutine, maître dans l’art de souffler le chaud et le froid. Devant les députés de la Chambre basse du Parlement russe, réunis jeudi à Yalta en Crimée, le Président a affirmé que la Russie «ne veut pas se couper du reste du monde». «Nous voulons calmement, avec dignité et efficacité, construire notre pays», a-t-il martelé, assurant vouloir la fin du bain de sang en Ukraine, mais répétant que la Crimée est une «partie inséparable de la Russie».
Puis, face aux discours beaucoup plus enflammés de nombreux députés, il a pris la posture du leader ferme mais raisonnable. Sur ce dossier ukrainien, qu’il gère personnellement depuis le début, il joue sa crédibilité.
Jusqu’ici, il a le soutien d’une population galvanisée par les surenchères nationalistes du pouvoir et des médias. D’où l’importance symbolique du convoi «humanitaire» parti de Moscou alors même que les rebelles disent être abandonnés par la Russie.
 «Pour lui, c’est une manière de montrer à l’opinion qu’il agit concrètement, mais ce peut être aussi un prétexte pour un casus belli alors que le temps presse pour les séparatistes qui sont en mauvaise posture», analyse Pavel Felgenhauer, expert militaire russe indépendant cité par l’AFP. 
Kiev tente de désamorcer le piège en acceptant l’entrée des camions, mais après inspection, et en imposant que la distribution de l’aide soit scrutée par l’OSCE (lire page 6), sous contrôle du Comité international de la Croix-Rouge.

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