lundi 21 février 2011

PAYS ARABES : Des milliers de manifestants, des centaines de morts et des régimes qui tremblent..

Après la Tunisie et l’Egypte, la Libye, le Bahreïn, l’Iran et le Maroc font face à la contestation....

 Des milliers de manifestants, des centaines de morts et des régimes qui tremblent
 

dimanche 20 février 2011
Les soulèvements populaires contre des régimes dictatoriaux, sclérosés et corrompus, se multiplient, dopés par les succès enregistrés par les Tunisiens et les Egyptiens à déboulonner Ben Ali et Moubarak. Après une semaine d’interruption pour des raisons techniques, Mediarabe.info tente de faire un "point express" de la situation dans une lecture transversale.

La presse arabe a consacré, la semaine écoulée, une part importante de ses pages à la situation insurrectionnelle qui s’étend sur l’ensemble des pays de la région, avec une notion spéciale à ce qui se déroule en Libye et à Bahreïn, où la répression semble être la plus sanglante.

Une chute de régime en Tunisie, une mutation en Egypte
La lecture de la presse arabe permet aux plus avisés de conclure que l’exemple de la Tunisie ne s’applique pas à l’Egypte. La chute de Ben Ali a en effet conduit à l’effondrement de son régime, contrairement à l’Egypte où, pour éviter justement l’écroulement du régime dont l’armée est la colonne vertébrale, les militaires ont imposé une mutation interne en poussant Hosni Moubarak au départ et en prenant les rênes du pouvoir de façon directe. Pourtant, le Raïs a tenté de retardé l’échéance en multipliant les concessions : il a sacrifié son ambition d’un sixième mandat, il a annoncé la non-candidature de son fils Gamal à sa succession, avant de le forcer à démissionner du PND... Rien à faire.

En effet, l’armée égyptienne veille aux grains. Pour couper la route aux Frères Musulmans, elle a forcé Moubarak à démissionner en lui garantissant une sortie honorable, contrairement au scénario tunisien. Ce soir, la télévision « Al Arabiya » affirme que les avocats de Hosni Moubarak démentent les informations de la presse relatives à sa fortune indûment amassée (70 milliards de dollars). L’ex-président égyptien s’apprête par ailleurs à demander un satisfecit judiciaire dans ce sens.

Rappelons que la presse arabe a spéculé, ces derniers jours, sur le sort de Ben Ali et de Moubarak. Le quotidien koweïtien « Al Anbaa » évoque, avec prudence, le décès de Ben Ali en Arabie saoudite, alors que le site « Elaph.com » souligne que« la Tunisie vient de demander officiellement à l’Arabie saoudite d’extrader l’ex-dictateur ». Le quotidien « Asharq Al Awsat » soulignait, cette semaine, sur le refus de Moubarak de se soigner, affirmant que « l’ex-président égyptien serait agonisant et aurait perdu connaissance à plusieurs reprises ».

Le quotidien « Al Quds Al Arabi » revient sur l’assassinat, vendredi, d’un prêtre polonais, près de Tunis, pour rappeler le spectre de la menace islamiste qui plane sur le pays au lendemain du renversement de Ben Ali. Pourtant, le parti islamiste Ennahda a condamné cet assassinat. Le quotidien soulignait samedi que « l’intifada des peuples arabes s’étend désormais à la Libye, au Yémen et à Bahreïn, et menace le Koweït, la Jordanie et Oman. La Syrie ne serait pas à l’abri ».

Vers la fin de Kadhafi ?
La situation dégénère en effet en Libye, où Saïf Al-Islam, le fils et successeur potentiel du Guide Kadhafi s’apprête à prononcer un discours à la nation, ce dimanche soir, après la répression qui a fait plusieurs dizaines de morts. Selon les dernières informations, plus de 300 personnes ont été tuées notamment à Benghazi (est). Cette insurrection a conduit l’une des principales tribus libyennes, la tribu des Warfla, à rallier l’insurrection, et plusieurs unités de l’armée libyenne ont rejoint les manifestants. Ce qui menace sérieusement le régime de Kadhafi. L’ambassadeur de Libye à la Ligue arabe vient de démissionner et de rejoindre les contestataires, selon « Al Arabiya ».

Rappelons que le quotidien « Al Hayat » avait parlé, dimanche matin, d’un véritable massacre en Libye, information confirmée par le quotidien koweitien « Al Seyassah », selon lequel « les révoltés ont incendié trois chars des forces de l’ordre, et ont abattu trois immigrés africains, et exhibé leurs cadavres à Benghazi. Les mercenaires de Kadhafi ont riposté et commis un massacre dans l’est du pays ». Ce soir, les Etats-Unis ont demandé à leurs ressortissants d’éviter la Libye, et réduisent leur représentation diplomatique à Tripoli. La fortune de Kadhafi, qui avoisine les 82 milliards de dollars selon le quotidien algérien « El Khabar », ne fait que renforcer la détermination de la population à renverser son régime. Pour l’anecdote, « Kadhafi a fait fortune en réduisant son train de vie. Au lieu de payer un loyer, il a vécu sous la tente », rappellent les humoristiques.

La course entre les dictateurs : lequel s’effondre en premier ?
Le Maroc a de son côté connu d’importantes manifestations, ce dimanche. Selon plusieurs sources, la contestation a été pacifique dans son ensemble, avec quelques exceptions à Marrakech notamment. L’Algérie avait réprimé la manifestation de samedi, faisant plusieurs blessés dont un député du RCD. La Coordination Nationale pour le Changement et la Démocratie (CNCD), à l’origine de cette contestation, table sur la durée de la mobilisation et parie sur une guerre d’usure avec le régime. Elle propose de manifester tous les samedis, jusqu’à la satisfaction de ses revendications. Pour sauver le régime, l’armée algérienne pourrait sacrifier le dernier fusible dont elle dispose, en obligeant Bouteflika à la démission. Une majorité d’Algériens accuse en effet leur président d’avoir cautionné la corruption, d’avoir préparé son frère Saïd à sa succession, d’avoir piétiné la Constitution pour pouvoir briguer une présidence à vie. Il a fait voter les modifications constitutionnelles à main levée par les deux chambres du Parlement, après avoir triplé le salaire des députés et des sénateurs...

Le Bahreïn intéresse l’Iran et le Hezbollah
A Bahreïn, au moins 55 personnes ont trouvé la mort dans la répression des manifestations animées par les Chiites, depuis le 14 février. Plusieurs sources affirment que la situation à Bahreïn intéresse l’Iran et le Hezbollah, la majorité de la population étant chiite, alors que le pays est dirigé par la minorité sunnite qui tente, depuis des décennies, d’inverser le rapport des forces démographiques à travers les naturalisations de ressortissants du Golfe de confession sunnite. D’ailleurs, des manifestations de soutien au pouvoir bahreïni se sont organisées et la monarchie semble confirmer le clivage entre Sunnites et Chiites, avec la menace que laisse planer un tel scénario. Le quotidien syrien « Al Watan », proche du président Bachar Al-Assad, souligne en effet que « l’inquiétude s’empare des Américains quant à l’avenir de leur base militaire de Bahreïn, la monarchie étant un allié stratégique des Etats-Unis et abritant le commandement de la 5ème flotte américaine, mais qui se révèle particulièrement fragile ».

Les apatrides menacent le Koweït et la Syrie
Quant au Koweït, la presse s’intéresse aux apatrides, communément appelés les « Bidounes », qui pourraient constituer une étincelle et provoquer une explosion sociale que le pouvoir a devancé en multipliant les primes et en ordonnant la gratuité des produits alimentaire pendant un an. Or, les revendications des « Bidounes » sont d’ordre politique : ils seraient décidés à manifester pour réclamer la nationalité koweïtienne, selon le quotidien « Asharq al Awsat ».

Les Kurdes sont les « Bidounes » de Syrie, et leurs revendications sont de même nature que ceux du Koweït. Les Kurdes seraient les plus disposés à mener la fronde, puisqu’ils sont privés de tous leurs droits depuis l’arrivée du parti Baas au pouvoir, en 1963, et la mise en place de la politique d’arabisation forcée. La presse syrienne reprend les déclarations du président Assad qui a récemment exclu tout risque de contagion en Syrie. Mais le quotidien koweitien « Al Seyassah » croit savoir que « la menace en Syrie inquiète surtout l’Iran et le Hezbollah. Le premier craignant la perte d’un régime allié, le second redoutant la rupture des aides iraniennes à travers Damas ». C’est dans ce contexte que l’Iran renforce sa présence militaire en Syrie et envoie deux bâtiments de la marine iranienne à Lattaquié. Ils doivent traverser la Mer rouge et le Canal de Suez mercredi prochain.

L’Iran : un arroseur arrosé ?
Mais l’Iran n’est pas à l’abri de la vague de contestation. Ce soir, « Al Arabiya » affirme qu’au moins deux personnes ont été tuées et plusieurs dizaines ont été blessés dans la répression des manifestations géantes qui ont été organisées à Téhéran, Mashhad et Shiraz notamment. La fille de l’ancien président Rafsandjani a été brièvement arrêtée pour avoir participé aux manifestations, alors que les chefs de l’opposition, Karroubi et Moussavi, sont pratiquement en résidence surveillée. Le site « Elaph.com » affirme ce soir que « près de 1.500 combattants du Hezbollah libanais contribuent à la répression en Iran ». L’on se demande comment les Iraniens peuvent secourir le régime syrien alors que le leur tremble sous la pression populaire ?

La Ligue arabe agonise
Dans ce contexte, le sommet de la Ligue arabe prévu fin mars en Irak serait menacé. La Libye, qui en assure la présidence depuis le sommet de Tripoli de mars 2010, demande le report du prochain sommet de Bagdad. L’Irak refuse et les autres Etats membres de la Ligue, préoccupés par une situation insurrectionnelle qui n’épargne aucun pays, hésitent à prendre position sur la date de leur sommet.

Chawki Freïha
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