mardi 19 septembre 2017

Israël courtise les « cœurs et les esprits » en Syrie pour éloigner le Hezbollah.....




Israël essaie calmement de gagner la bataille des « cœurs et des esprits » des Syriens, en leur permettant, au besoin, de franchir la frontière pour leur prodiguer des soins médicaux (The Washington Post)



Il est 4h 30 du matin et l’obscurité est totale, quand les enfants syriens malades et leurs mères commencent à traverser la frontière vers Israël. Il y a une petite fille d’un an avec un strabisme et un autre de deux ans avec un défaut de naissance qui l’empêche de marcher. La famille d’une enfant frêle de 12 ans s’inquiète qu’elle ne grandit pas. Un enfant a une éruption de rougeur, l’autre une toux persistante. 

Ils émergent de la nuit noire vers l’éclairage jaune pâle des lumières du poste de sécurité du côté israélien de la barrière sur les Hauteurs du Golan libéré, où ils cherchent à ce qu’on leur accorde le passage. Il y a ce jour-là 19 enfants au total, un groupe moins important que ceux qui apparaissent la plupart du temps, chaque semaine.Ces enfants bénéficient de cette attention et de ces autorisations dans le cadre du programme « Bons voisins », qui a commencé à soigner les combattants et les civils syriens dès les premiers jours de l’éclatement de ce conflit ou guerre civile syrienne, mais qui s’est, maintenant, étendu à une opération plus complexe, qui permet aussi l’envoi de carburant, de nourriture et d’approvisionnement en Syrie.

Les responsables israéliens insistent sur l’aspect humanitaire du programme, mais il a aussi un autre objectif : créer une zone amicale, juste à l’intérieur de la Syrie,afin de servir de rempart contre l’archi-ennemi d’Israël, le mouvement chiite Hezbollah.

Une femme-clown amuse un enfant syrien, qui attend pour des soins dans un hôpital en Israël (SufianTaha/The Washington Post). 

Israël observe avec une certaine inquiétude, le fait que le Président Bachar el Assad reprenne le dessus, grâce à ses alliés du Hezbollah et de l’Iran, ses principaux soutiens, qui en profitent pour renforcer leur présence le long de la frontière.
Mais pour le moment au moins, les groupes rebelles syriens contrôlent l’essentiel du côté syrien d’une frontière longue de 45 km entre les deux pays. Israël espère que les choses se maintiennent ainsi.
Les officiers supérieurs de l’armée israélienne démentent apporter une assistance directe au moindre groupe sunnite le long de la barrière de sécurité, qui s’opposent au Hezbollah et au régime syrien, ou même de coordonner l’aide humanitaire à leur profit. Mais un ancien officier supérieur des renseignements de Tsahal (AMAN) confie qu’Israël a apporté un soutien à environ une douzaine de groupes et que l’Etat hébreu pourrait avoir donné une certaine assistance financière « ici ou là ».
« D’abord et avant tout, cela avait un rapport avec les principes moraux. Des gens étaient blessés de l’autre côté de la frontière – venaient devant nos barrières – ils allaient mourir », rappelle le Général de Brigade Eli Ben-Meir, qui a occupé, jusqu’à l’année dernière, le poste de directeur de la Division d’Analyse et de Recherches du corps des Renseignements Militaires de Tsahal (AMAN). « Puis cela a débouché sur pas mal d’autres sujets de préoccupation ».
On était en 2013, disent les responsables de l’armée israélienne, quand le premier groupe de blessés syriens s’est approché de la barrière de sécurité israélienne sur les hauteurs du Golan, un plateau stratégique qu’Israël a partiellement conquis en 1967 et annexé plus tard (1981), une décision qui ne bénéficie pas de la reconnaissance de la communauté internationale.
On évalue à environ 3.000 le nombre de blessés syriens soignés en Israël, selon les officiers israéliens interrogés, bien qu’un médecin syrien interviewé, de l’autre côté de la frontière dise que le nombre de personnes circulant pour obtenir des soins médicaux apparaisse bien plus important.
Dès que les combats se sont calmés le long de la frontière, Israël a commencé à offrir des soins médicaux pour des affections plus courantes. Plus de 600 enfants syriens ont ét »é conduits en bus vers des hôpitaux israéliens au cours de l’année précédente.


Des soldats-soldates israélien(ne-)s se tiennent prêts à distribuer des stocks alimentaires pour les réfugiés syriens sur une base de l’armée du Plateau du Golan, le 19 juillet 2017.
Israël planifie la mise sur pied d’un nouvel hôpital de campagne, afin de traiter les patients issus de la guerre civile qui frappe le pays, du côté syrien de la barrière, à partir du côté israélien de la ligne de démarcation sur le Plateau du Golan, qui correspond à la ligne d’armistice de 1967./ AFP PHOTO / MENAHEM KAHANA
Israël a transféré 360 tonnes de nourriture, près de 454.250 litres d’essence, 90 palettes de médicaments et 50 tonnes de vêtements, ainsi que des générateurs électriques, de la tuyauterie pour puiser l’eau et des matériaux de construction, déclare Tsahal.
« On a assez vite compris que si nous n’assurions pas un minimum de présence, quelqu’un d’autre tenterait de les influencer », dit Ben-Meir. La motivation humanitaire était « énorme », ajoute t-il. « Mais, plus l’aide devient importante et forcément coûteuse et plus cela a à voir avec une victoire dans la bataille des cœurs et des esprits »
Des relations plus étroites signifie aussi des renseignements plus riches. Officiellement, Israël a maintenu une position neutre dans la guerre en Syrie, mais Tsahal est intervenu pour protéger ses intérêts. Tout au long de ce conflit, des liquidations ciblées et des frappes aériennes sur les sites d’armement en Syrie ont été attribuées à Israël, bien que le gouvernement l’ait rarement reconnu publiquement.
Lors d’une dernière frappe contre un site chimique et missilier, la Syrie a accusé Israël d’avoir bombardé une installation militaire liée à la production de roquettes du Hezbollah.
Le programme rappelle les premiers jours du Programme « La bonne Frontière » mené par Israël, au Liban, quand la guerre civile a éclaté en 1975. Le Ministre de la Défense de l’époque, Shimon Peres, soulignait le caractère purement humanitaire du projet, visant à établir de bonnes relations de voisinage, alors qu’Israël soignait les réfugiés libanais et apportait son assistance au sud du pays, « librement et sans contraintes ».
Par la suite, Israël a aussi tenté d’empêcher les tentatives d’infiltrations des groupes terroristes palestiniens et a apporté tout son soutien à l’Armée du Liban Sud.
« C’est facile de supposer que nous faisons ça parce que, si vous accordez une faveur à quelqu’un, vous en recevez une en échange » [que c’est donnant-donnant], fait remarquer le Major Sergeï Kutikov, chef du Département médical « Bons Voisins », alors qu’il se promène le long de la frontière pour aller à la rencontre des patients. Les membres de Tsahal laissent leurs véhicules militaires derrière eux, de façon à ne pas attirer l’attention. « Mais la raison, dans mon esprit, est réellement d’apporter de l’aide humanitaire ».
A la différence des autres voisins de la Syrie, Israël n’accueille pas de réfugiés, bien qu’il ait récemment accepté 100 orphelins syriens. Israël est en état de guerre avec son voisin du nord depuis environ 70 ans.
« Ils semblent toujours stressés quand ils franchissent la frontière », explique Kutikov. « Ils ne savent pas à quoi s’attendre ».
Alors que le ciel commence à s’éclaircir, les familles s’embarquent à bord du bus pour faire le trajet de près d’une heure vers un hôpital sur les bords de la Mer de Galilée (lac de Tibériade-Kineret). Les Syriens obtiennent une priorité sur les autres patients, disent les membres de l’équipe médicale. Les meilleurs spécialistes ont été convoqués. Un clown distrait les enfants.
« Le régime ne nous a rien laissé », dit un médecin syrien qui a traversé la frontière avec le groupe. Il affirme que deux roquettes sont tombées sur son bloc opératoire il y a un an. Il a commencé à venir à la frontière il y a deux mois, même s’il avait peur des conséquences, si les gens étaient découverts ». « J’ai fait ça pour le bien des enfants », dit-il. »On en a tant vu. On a frôlé la mort ».
Alors que la majorité du territoire de la zone le long de la barrière est contrôlée par des groupes rebelles sunnites, une petite section est détenue par le régime syrien et une autre (36 km de long) par les djihadistes de l’Etat Islamique.
Kutikov explique qu’il n’y a pas de contact avec les groupes rebelles le long de la frontière. Ben-Méir démontre que ce n’est pas nécessaire.
« En général, les types impliqués dans l’agriculture, l’approvisionnement alimentaire des populations, dans le soin apporté aux situations de santé sont les mêmes types qui prennent la responsabilité de les défendre et de combattre contre le régime », explique Ben-Méir.
Le cessez-le-feu dans ce secteur tient en majeure partie. Mais autant Israël que les communautés de la frontière sont inquiets que ce ne soit probablement qu’une question de temps avant qu’Assad ne tente de reprendre le contrôle de ce territoire.
Un assistant para-médical travaillant à la frontière affirme que les gens du voisinage préféreraient se tourner vers Israël plutôt que vers le régime.
Après leurs examens médicaux, les enfants sont restés la journée entière et ont fait le voyage dans l’autre sens, la nuit suivante. Certains sont gardés plus longtemps s’ils ont besoin de soins d’urgence.
« J’étais très réticente, au départ, à l’idée de venir en Israël », dit la mère qui espère maintenant que les médecins israéliens pourront corriger le strabisme de sa fille. « Nous ne pouvons obtenir de soins que dans les zones contrôlées par le régime, mais c’est trop dangereux. J’ai de la famille qui fait partie des martyrs et des prisonniers et mon père et mon frère sont recherchés ».
Une petite fille âgée de 7 ans effectuait son troisième séjour en Israël pour des problèmes qui sont les séquelles d’un bombardement aérien, il y a trois ans, qui a tué son frère-jumeau. Sa mère dit que c’est le commandant local des rebelles qui leur a dit d’aller au plus vite en Israël.
« Au début, j’avais peur, mais ensuite j’ai constaté que les soins étaient superbes », dit cette femme âgée de 36 ans. « On nous a inculqué qu’ils sont notre ennemi, mais en réalité, ils sont très amicaux ».
Sufian Taha sur les hauteurs du Golan Heights, Heba Habib à Stockholm et Zakaria Zakaria à Istanbul, ont contribué à ce reportage.

 le 11 septembre
Loveday Morris is the Post’s Jerusalem bureau chief. She was previously based in Baghdad and Beirut for the Post.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

La grandeur de Binyamin Netanyahou....

Binyamin Netanyahou était en visite aux Etats-Unis pour la conférence annuelle de l’AIPAC. Cette visite devait être triomphale. Elle a ...